Un Algérien de 44 ans, condamné pour terrorisme et assigné à résidence depuis 2008, a saisi la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) pour faire condamner la France qu’il accuse de l’avoir assigné à résidence « à perpétuité », a-t-on appris mardi 16 octobre.
En 2005, Kamel Daoudi avait été condamné en appel à six ans de prison et à une interdiction définitive du territoire pour « association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste », et déchu de sa nationalité française.
Membre d’un groupe islamiste affilié à Al-Qaida dirigé par Djamel Beghal, il était soupçonné d’avoir préparé un attentat contre l’ambassade des Etats-Unis à Paris.
La CEDH avait toutefois interdit son expulsion en raison du risque de torture en Algérie, pays qu’il avait quitté à l’âge de cinq ans.
Couvre-feu et pointages en gendarmerie
« Kamel Daoudi, plus ancien assigné à résidence de France, demande à la CEDH la condamnation de la France », écrit son avocat Bruno Vinay dans un communiqué. « Depuis dix ans, cinq mois et dix-sept jours, Kamel Daoudi est assigné à résidence sur décision du ministre de l’intérieur », poursuit-il.
Selon Me Vinay, Kamel Daoudi ne peut sortir de sa commune, doit pointer trois fois par jour à la gendarmerie et doit respecter un couvre-feu.
Après plusieurs déplacements, il a été « transféré » fin 2016 dans une chambre d’hôtel de 9 m2 à Saint-Jean-d’Angely (Charente-Maritime), « à 460 kilomètres de ses enfants français et de sa compagne », a-t-il expliqué à l’AFP. Pour l’avocat, « l’objectif manifeste est de réduire à néant la dignité d’un homme ».
Me Vinay a posé deux questions à la CEDH : « Lorsqu’on est sous le régime de l’assignation à résidence, dans les conditions de Kamel Daoudi, est-on privé de sa liberté ou a-t-on juste des restrictions dans sa liberté ? » et « une mesure d’assignation à résidence administrative peut-elle être à durée illimitée ? »
« Les juridictions françaises ont toutes rejeté les recours de Kamel Daoudi. (…) Jusqu’au Conseil constitutionnel qui a estimé que son assignation pouvait sans méconnaître notre Constitution être perpétuelle », a expliqué l’avocat.
En décembre, le Conseil constitutionnel avait, en effet, recadré l’assignation à résidence : les « sages » ont reconnu au législateur le droit « de ne pas fixer de durée maximale à l’assignation à résidence » mais ont demandé un réexamen dans le temps de la situation. La loi prévoit depuis mars qu’il faut motiver la décision au bout de cinq ans.