Les temps sont difficiles pour Elon Musk. En indélicatesse avec la SEC, le « gendarme » de Wall Street, en difficulté avec son entreprise Tesla, qui produit des voitures électriques haut de gamme, l’entrepreneur vient de subir un échec avec SpaceX, qui développe les fusées réutilisables Falcon.
Pourtant, le 8 octobre, SpaceX a réussi une prouesse technologique en faisant décoller et atterrir une fusée Falcon 9 au même endroit, après avoir mis sur orbite un satellite commercial argentin. Mais, deux jours plus tard, et alors qu’il est question de créer une « force spatiale » américaine, le Pentagone a plombé l’ambiance en ne retenant pas l’entreprise d’Elon Musk pour son programme Evolved Expendable Launch Vehicle [EELV], qui vise à réduire les coûts de lancement de ses satellites tout en se passant de moteurs de fusées RD-180 produits en Russie.
Cependant, une entreprise fondée par un entrepreneur ayant fait fortune grâce à Internet, comme Elon Musk, a bien été retenue pour ce programme. En effet, Blue Origin, qui appartient à Jeff Bezos, le fondateur d’Amazon et le propriétaire du Washington Post, a obtenu un contrat de 500 millions de dollars dans le cadre du programme EELV. Deux autres industriels ont été sélectionnés, dont Northrop Grumman Innovation Systems [ex-Orbital ATK, ndlr] et le consortium ULA [United Launch Alliance], formé par Boeing et Northrop Grumman. Des contrats de 792 et de 967 millions de dollars leur ont été respectivement attribués.
D’ici 2020, les trois entreprises retenues auront à mettre au point des prototypes de lanceur, à savoir : OmegA pour Grumman Innovation Systems, Vulcan Centaur pour ULA et New Glenn pour Blue Origin.
Comme les Falcon de SpaceX, la fusée New Glenn sera également réutilisable. Du moins, ce sera le cas pour son premier étage. Ce lanceur sera capable de mettre sur une orbite de transfert géostationnaire 13 tonnes de charge utile [la capacité d’Ariane 6 sera de 12 tonnes, ndlr].
Au final, le Pentagone entend sélectionner deux de ces trois entreprises, afin de les mettre continuellement en concurrence.
« ULA a lancé 130 missions, avec 100% de succès. Avec un Vulcan Centaur de fabrication américaine, nos clients bénéficieront de la même fiabilité, avec des performances supérieures à un coût inférieur », a déjà fait valoir le consortium formé par Boeing et Lockheed-Martin.
Cela étant, Jeff Bezos est beaucoup plus discret sur la scène médiatique qu’Elon Musk. Depuis que la librairie en ligne Amazon.com a vendu, en 1995, son premier livre via Internet (Fluid Concepts and Creative Analogies de Douglas Hofstadter, pour l’anecdote), l’entrepreneur a amassé une fortue estimée à plus de 100 milliards de dollars.
Au-delà des activités spatiales, Jeff Bezos vise un autre marché encore plus lucratif : celui du « cloud » du Pentagone, dont la valeur est estimé à 10 milliards de dollars. La branche Amazon Web Services du géant du commerce en ligne est en effet en lice, aux côtés de Microsoft et d’Amazon. En 2013, elle avait déjà décroché un contrat de 600 millions de dollars pour le cloud de la CIA.