Depuis avril, le ministère allemand de la Défense a toutes les informations nécessaires pour choisir le type d’appareil qui remplacera les chasseurs-bombardiers Panavia Tornado de la Luftwaffe, lesquels, et c’est un détail important, sont en mesure d’emporter des bombes nucléaires tactiques B-61 mises à la disposition de l’Otan par les États-Unis.
Quatre avions sont en compétition : le F-35A de Lockheed-Martin, le F-15SE et le F/A-18 Super Hornet de Boeing ainsi que le Typhoon, du consortium européen Eurofighter (BAE Systems, Airbus, Leonardo).
Le choix qui sera fait par Berlin sera crucial pour l’industrie européenne de l’aéronautique, sachant que l’Allemagne est désormais partenaire de la France pour mettre au point le Système de combat aérien futur (SCAF). »
Aussi, plusieurs responsables politiques allemands, dont la ministre de la Défense, Ursula von der Leyen, ont affiché leur préférence pour acquérir davantage d’Eurofighter Typhoon car, avait expliqué Dirk Hoke, le Pdg d’Airbus Defence & Space, en novembre 2017, cela « permettrait de maintenir une solution européenne, d’éviter d’acheter le F-35 […] dont les Européens n’auront jamais la maîtrise ».
Quant à la Luftwaffe, elle pencherait pour le F-35A… Ce qui a d’ailleurs valu, dit-on, une retraite anticipée au général Karl Müllner, qui était son chef d’état-major jusqu’en mars dernier, en raison de ses prises de position en faveur de l’avion proposé par Lockheed-Martin.
Ce remplacement des Tornado a des implications militaires, bien sûr, mais aussi politiques et diplomatiques. Et la question porte essentiellement sur la capacité nucléaire que devront avoir leurs successeurs, étant donné que, visiblement, Berlin n’entend pas y renoncer, même si les récentes turbulences traversées par les relations avec Washington ont donné lieu à un débat sur ce sujet.
« L’Otan reste indispensable pour la défense collective et la sécurité de l’Europe. Cela ne va pas changer même si le gouvernement américain actuel veille plus jalousement sur les intérêts de son pays et que la Maison Blanche communique sur un ton plus acerbe et plus cavalier », a encore récemment répété Mme von der Leyen, en faisant une allusion aux tensions commerciales entre les États-Unis et l’Allemagne.
Une autre donnée du problème est le coût de plus en plus important qu’il faudra assumer pour maintenir en état de vol les Tornado de la Luftwaffe, cette dernière devant être la dernière force aérienne européenne à les utiliser étant donné que la Royal Air Force et l’Aeronautica Militare italienne retirent progressivement les leurs du service au gré des livraisons de F-35.
D’où d’ailleurs, selon l’agence Reuters, le projet de Berlin de hâter le remplacement des Tornado, c’est à dire qu’il serait question de boucler ce dossier avant 2025. Début août, le ministère allemand de la Défense a demandé à Boeing, à Lockheed-Martin et au consortium Eurofighter s’ils seraient en mesure d’accélérer les livraisons des avions susceptibles de leur être commandés.
Toujours d’après Reuters, qui cite deux sources, Berlin aurait également demandé à Washington des informations sur la possibilité de louer des avions F-15SE.
En tout cas, une accélération du remplacement des Tornado de la Luftwaffe ne plaide pas forcément en faveur de l’Eurofighter Typhoon, les autorités américaines ayant fait savoir qu’il faudrait entre cinq et dix ans pour certifier cet appareil pour des missions nucléaires, la priorité étant donnée, à Washington, au F-35.
En revanche, cette question ne se poserait pas pour le F/A-18 Hornet et le F-15SE puisque ces deux avions sont supposés avoir déjà la capacité d’emporter les bombes tactiques B-61.
Parmi les options avancées, l’une évoque l’achat de 40 à 45 F-35A. Cette dernière aurait l’avantage de permettre à la Luftwaffe de mettre en oeuvre une flotte mixte d’avions de combat tout en s’épargnant des délais trop importants pour obtenir la certification nucléaire des Typhoon. Cela vaudrait aussi pour le F/A-18 et le F-15…