À l’origine, la marine américaine voulait se doter d’une drone de combat furtif qui, depuis un porte-avions, aurait été utilisé pour opérer dans des environnements fortement contestés. D’où le programme UCLASS (Unmanned Carrier-Launched Airborne Surveillance and Strike) et les essais du démonstrateur X-47B lequel, conçu par Northrop-Grumman, « défricha » le terrain, la mise en oeuvre d’un tel appareil sur un pont d’envol étant compliquée.
Finalement, après réflexion, l’US Navy abandonna le programme UCLASS, estimant que le concept d’un drone pouvant ravitailler en vol ses chasseurs-bombardiers embarqués était sans doute plus judicieux. Ainsi, avec 10 appareils de ce type, il serait possible d’accroître significativement le rayon d’action de deux fois plus de F-35C (un avion conçu, justement, pour les environnements non-permissifs) ou de F/A-18 Super Hornet. En un mot, cela permettrait de frapper plus fort tout en évitant d’exposer un porte-avions à la menace des missiles adverses. Et le projet CBAR [Carrier-Based Aerial-Refueling System] fut donc lancé en 2016.
Rebaptisé « MQ-25A Stingray » par la suite, ce programme donna lieu à un appel à projets, auquel répondirent Boeing, Northrop Grumman, Lockheed-Martin et General Atomics (en partenariat avec Boeing Autonomous Systems).
Donné favori, Northrop Grumman jeta l’éponge en novembre 2017. Aussi, étant donné que Lockheed-Martin songeait à un drone en forme d’aile volante, d’aucuns pensaient que ce dernier allait réunir les suffrages de l’US Navy. Mais c’était faire fausse route.
Le 30 août, le Pentagone a en effet indiqué qu’il venait d’attribuer un contrat d’une valeur 805 millions de dollars à Boeing pour développer le MQ-25A « Stingray ».
Imaginé par la division Phantom Works de Boeing (celle chargée des projets spéciaux), le concept retenu s’appuie sur un appareil doté d’un empennage en V. Son envergure a l’air d’être relativement imposante dans la mesure où il ne s’agit pas d’une aile volante, la furtivité n’ayant pas été un critère déterminant, contrairement, a priori, à la possibilité de lui intégrer, à l’avenir, d’autres capacités, notamment ISR (renseignement, surveillance, reconnaissance).
En outre, le MQ-25A devra être en mesure de fournir près de 7.000 litres de carburant à 500 milles (920 km environ) du porte-avions. Cette mission de ravitaillement en vol est actuellement assurée par des F/A-18 Super Hornet en configuration « Nounou ». Entre 20 et 30% de leur temps de vol est dédié à cette tâche. D’où l’intérêt de ce drone ravitailleur.
« C’est un jour historique […] Quand nous repenserons à ce jour, nous reconnaitrons que cet événement représente un tournant dans la façon dont nous définissons nos besoins pour le combat, nous travaillons avec l’industrie de défense, nous coordonnons appareils avec pilotes et sans pilotes, et nous améliorons l’efficacité de notre aéronavale. Le tout rapidement », a commenté l’amiral John Richardson, le chef de l’US Navy, au sujet de ce contrat.
Selon les termes de ce dernier, Boeing devra concevoir, développer, fabriquer, tester, livrer et entretenir quatre MQ-25A afin de fournir une capacité initiale à la marine américaine d’ici 2024. Si le programme se déroule conformément aux attentes, alors une commande de 72 appareils sera passée, pour un montant évalué à 13 milliards de dollars.
Photo : MQ-25A (c) Boeing