En septembre 2013, un mini-drone s’était écrasé au pied d’un podium où la chancelière allemande, Angela Merkel, prononçait une allocution. Le propriétaire de l’appareil, un informaticien alors âgé d’une vingtaine d’années, avait expliqué que son intention était de dénoncer la « surveillance policière ».
Cet épisode démontrait, s’il en était encore besoin, que la sécurité des chefs d’État et de gouvernement pouvait être remise en question par l’usage de drones disponibles dans le commerce. Ce type de menace a pris un tour nouveau depuis que l’État islamique (EI ou Daesh) a utilisé de tels appareils avec des explosifs.
Et, a priori, le président vénézuelien, Nicolas Maduro, réélu en mai dernier dans des conditions contestées (opposition muselée, seulement 46% de participation), a été la cible d’une tentative d’attentat commise selon ce mode opératoire, alors qu’il prononçait un discours lors d’une cérémonie militaire à Caracas, le 4 août.
Sur les images retransmises par la télévision vénézuélienne, l’on voit le président Maduro, son épouse à ses côtés, parler devant un microphone. Des officiers et des gardes du corps se tiennent derrière le couple. À moment, le président vénézuélien arrête de parler et lève les yeux au ciel, tandis que sa femme fait un mouvement comme pour se protéger de quelque chose. Le plan suivant montre le visage à l’apparence calme d’un soldat, puis des troupes alignées devant la tribune présidentielle. Au bout de plusieurs secondes, les rangs se rompent et l’on entend des cris. La retransmission est alors interrompue.
Plus tard, le ministre vénézuélien de la Communication, Jorge Rodriguez, a affirmé le président Maduro avait échappé à un attentat commis avec des drones chargés d’explosifs. Attentat au cours duquel 7 militaires auraient été blessés.
« Une charge explosive […] a détoné à proximité de l’estrade présidentielle » et d’autres charges ont explosé en plusieurs endroits de la cérémonie, a ensuite expliqué ce ministre. M. Maduro « en est sorti complètement indemne et se trouve en ce moment en train d’effectuer son travail habituel » et il est « en réunion permanente avec le haut commandement politique, avec les ministres et avec le haut commandement militaire » a-t-il ajouté, avant de faire état de « sept blessés » par les membres de la Garde nationale bolivarienne.
Puis, le président Maduro a ensuite pris la parole lors d’une allocution radio-télévisée pour donner les résultats d’une enquête conduite avec une telle célérité qu’elle interroge.
« Aujourd’hui on a essayé de m’assassiner », a commencé par dire le président Maduro. « Je n’ai pas de doute que le nom de Juan Manuel Santos [le président de la Colombie, ndlr] est derrière cet attentat », a-t-il accusé.
« Les premiers éléments de l’enquête indiquent que plusieurs financiers vivent aux Etats-Unis, en Floride. J’espère que le président Donald Trump est disposé à combattre les groupes terroristes », a continué M. Maduro. « Une partie des auteurs matériels de l’attentat ont été arrêtés et sont en train d’être jugés […] Je ne vais pas m’avancer davantage mais l’enquête a déjà bien progressé », a-t-il conclu.
La Colombie a immédiatement répondu aux accusations de M. Maduro. « Il est absurde et infondé de dire que le président colombien serait responsable de l’attentat supposé contre le président vénézuélien », a répondu le ministère colombien des Affaires étrangères. « Comme d’habitude, le président vénézuélien accuse en permanence la Colombie de tout ce qui se passe. Nous exigeons le respect pour le président Juan Manuel Santos, pour le gouvernement et pour le peuple colombien », a-t-il insisté.
Dans un entretien donné à l’AFP, le 30 juillet, M. Santos avait estimé que le régime « chaviste » était proche de la fin, au Venezuela, en raison de la situation économique désastreuse que connaît ce pays, pourtant riche en ressources pétrolières. Et il avait dénoncer la « toujours plus efficace » exercée par le pouvoir vénézuélein à l’encontre de ses opposants.
Pour rappel, la Colombie et le Venezuela partagent une frontière longue de 2.200 km. Les relations entre les deux pays sont loin d’être au beau fixe. Ainsi, Bogota avait reproché à Caracas sa « bienveillance » (si ce n’est davantage) à l’égard des guérilleros marxistes des FARC. Plus récemment, les deux pays connaissent une crise diplomatique, humanitaire et migratoire…
Quoi qu’il en soit, la tentative d’attentat contre la personne de M. Maduro a été revendiquée par le groupe alors inconnu appelé « Mouvement national des soldats en chemise ».
« Nous ne pouvons pas tolérer que la population soit affamée, que les malades n’aient pas de médicaments, que la monnaie n’ait plus de valeur, que le système éducatif n’enseigne plus rien et ne fasse qu’endoctriner avec le communisme », a expliqué cette organisation.
Cette tentative d’attentat contre le président vénézuélien coïncide avec le premier anniversaire de l’installation d’une « Assemblée constituante », qui, composée exclusivement de partisans du régime chaviste, dispose de compétences et de prérogatives élargies par rapport au Parlement, seule institution contrôlée par l’opposition. C’est grâce à cette dernière que M. Maduro a pu se maintenir au pouvoir.
En attendant, le Venezuela vit une situation économique catastrophique, avec une inflation qui pourrait atteindre 1.000.000% en 2018 et un PIB annoncé en retrait de 18%.