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Les retours d’expérience [RETEX] des opérations menées en Syrie et en Ukraine par la Russie [ou par des groupes soutenus par cette dernières] ont mis en évidence un recours sytématique aux moyens de guerre électronique avant chaque manoeuvre, que ce soit pour brouiller un signal GPS, les communications ou bien encore pour provoquer la perte de drones d’observation, comme ce fut le cas des appareils utilisés par la mission de l’OSCE dans le Donbass [sud-est de l’Ukraine].
D’où une prise de conscience au sein de l’US Army, qui, jusqu’alors, ne dédiait que 0,8% de son budget aux capacités de guerre électronique. D’où sa décision de rattraper son retard dans ce domaine. Et ce retard est d’autant plus préjudiciable que bon nombre de ses unités ne sont plus en mesure de fonctionner en mode « dégradé » pour s’orienter, se déplacer et communiquer.
C’est ainsi qu’a été créé, en août 2016, l’Army Rapid Capabilities Office [RCO], avec la mission de développer rapidement les capacités (1 à 5 ans) dont l’US Army a besoin. Et, naturellement, la guerre électronique fait partie de ses priorités. Après 15 ans de contre-insurrection en Irak et en Aghanistan, il s’agit désormais d’anticiper d’éventuels combats contre des adversaires étatiques (ou ayant su acquérir des capacités importantes) dans des environnements contestés.
En février dernier, les premiers prototypes de nouveaux capteurs, conçus pour proteger les unités de combat de cyber-intrusions et contrer les menaces électromagnétiques, ont été livrés au 2nd Cavalry Regiment, installé à Vilseck, en Allemagne. D’autres unités de la 173e brigade aéroportée en ont été dotées par la suite.
Dans un premier temps, ces nouveaux systèmes doivent permettre de « géolocaliser » les émetteurs hostiles et d’empêcher les communications tactiques de l’adversaire. « Ces capacités aideront les soldats à manœuvrer dans les opérations terrestres sans être perturbés par les tactiques de guerre électronique ennemies », avait explique le RCO.
Ces systèmes ont été évalués à l’occasion de l’exercice Saber Strike, qui a eu lieu entre les 3 et 15 juin en Pologne et dans les pays baltes, avec 18.000 militaires. C’est donc dans le cadre de ces manoeuvres que, pour la première fois en Europe depuis la fin de la Guerre Froide, un peloton de l’US Army a effectué une « attaque électronique active » [brouillage, ndlr] des systèmes utilisés par une unité lituanienne ayant le rôle de plastron.
« La capacité des Lituaniens à brouiller les systèmes américains a eu un effet sur les opérations du régiment. Et les commandants ont pu ressentir un réel impact face à un adversaire doté de telles capacités », a commenté l’adjudant-chef Michael Flory, du 2nd Cavalry Regiment, dans le colonnes de Defense News.
Quant aux résultats obtenus par cette capacité de guerre électronique, le colonel Sean Lynch, officier spécialiste, a été évasif. « Bien que beaucoup de choses ont été découvertes et perfectionnées du point de vue technique, de la mise en réseau et de la formation, il reste encore du travail à faire », a-t-il confié à la même source. Cela étant, comme l’explique l’US Army, il ne s’agit que de « solutions provisoires, conçues comme un pont vers des programmes durables qui sont en encore en développement ».
Cela étant, l’US Army n’est pas la seule à avoir mis en oeuvre des moyens de guerre électronique lors d’un exercice. Les forces russes en ont fait autant à l’occasion des manoeuvres Zapad 2017, en Biélorussie. À cette occasion, il a été rapporté qu’elles avaient testé de nouvelles armes « cybernétiques » et utilisé des moyens ayant brouillé les signaux de téléphonie mobile et GPS.
« Les Russes savent comment nous allons fonctionner. Ils ont beaucoup investi dans la guerre électronique parce qu’ils savent que nous sommes une force connectée et précise et qu’ils doivent nous déconnecter pour nous rendre imprécis », avait averti le général Philip Breedlove, quand il était encore le commandant suprême des forces alliées en Eurpope [SACEUR], en 2016.