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 | Sujet: Mai 68 a-t-il vraiment commencé à Quimper ?  Mar Mai 15 2018, 08:39 | |
| Pour l’historienne Ludivine Bantigny, l’émeute paysanne hyperviolente du 2 octobre 1967, à Quimper, a servi de modèle aux manifestations parisiennes. « Les premiers pavés de 68 ont été lancés à Quimper, lors de la manifestation d’octobre 1967 », affirme l’historienne Ludivine Bantigny (Ouest-France du 5 mai 2018). Son propos a de quoi étonner, tant sont ancrées dans les esprits les images des émeutes étudiantes du Quartier latin, diffusées en boucle par la télévision gaullienne. Le bal des violencesEn évoquant la manifestation de Quimper (Finistère), l’historienne met le doigt sur un aspect oublié de Mai 68 : le rôle moteur des paysans, en particulier dans le Finistère. Ici, en mai 68, il n’y a en tout et pour tout que 3 350 étudiants à Brest. Ils ne pouvaient jouer qu’un rôle secondaire.Ce sont les paysans qui ont lancé le bal des violences et de la répression, ce lundi 2 octobre 1967. Poussée par sa base, la FNSEA a consenti à organiser des manifestations pour dénoncer la chute des cours du porc. Depuis l’entrée de la France dans le Marché commun, et la mise en place d’une politique agricole commune en 1962, l’agriculture se modernise à marche forcée : remembrement, mécanisation, endettement, concentration, le modèle breton de la petite exploitation familiale disparaît en quelques années, laissant des paysages dévastés et des milliers de paysans démunis. Bataille rangéeC’est dans ce climat que, le 2 octobre 1967, environ 15 000 paysans convergent vers Quimper. Ce ne sont pas des gauchistes. Des prêtres sont dans le cortège, les élus du centre et de la droite prennent la parole. Mais certains orateurs, notamment les jeunes du CDJA, remettent en question la politique européenne et l’intégration capitaliste à marche forcée. Tous traduisent le sentiment d’abandon de la Bretagne.La manifestation commence par des gestes symboliques : on dépose ironiquement une gerbe à la mémoire d’Edgar Faure, ministre de l’Agriculture, on traîne un porc devant les policiers. Les manifestants gagnent la rue Vis, près du palais de justice, où ils mettent à sac la permanence de Marc Bécam, futur maire de Quimper, alors député gaulliste. Deux policiers mettent en joueCinq agents de police gardent la préfecture. Ils sont vite balayés. 500 CRS surgissent alors des jardins de la préfecture. C’est la bataille rangée. Pendant quinze minutes, un violent corps à corps oppose les policiers aux manifestants, dont certains sont casqués et armés de gourdins. Les grenades lacrymogènes pleuvent, les manifestants descellent les pavés et les lancent sur la préfecture et les forces de l’ordre. Ils renversent une voiture et y mettent le feu, la loge du gardien de la préfecture est en flammes.L’affrontement dure deux heures. Le bilan officiel fera état de 279 blessés, dont 179 parmi les policiers. Un manifestant de 35 ans a le crâne fracturé et sombre dans le coma. Un policier a la colonne vertébrale brisée. Mais le bilan aurait pu être plus lourd : alors que les CRS se replient, un groupe de manifestants enfonce la grille d’honneur de la préfecture. Deux policiers les mettent en joue avec leur fusil. Les paysans ont la sagesse de reculer…On a évité la tragédie, mais la manifestation de Quimper fera la une de Paris-Match, marquera les esprits, et donnera le ton des violences à venir. |
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