Les blessés psychiques de l'armée ne sont plus un tabou
Défense - Armée - Dossier
Les sapeurs du «31 e» ont été fortement engagés sur l'opération Serval. Blessés psychiques de guerre,
des militaires du 31e régiment du génie osent témoigner pour la première fois.
Mieux pris en charge,
le nombre de soldats ayant un syndrome de stress post-traumatique
aurait atteint un pic six mois après l'opération Serval, au Mali.
Revenus d'Afghanistan,
d'ex-Yougoslavie et plus récemment du Mali,
le nombre de militaires blessés psychiques revenant du feu n'a pas cessé de croître.
«Six mois après l'opération Serval,
les cas de SPT ont fortement progressé», confirme le lieutenant-colonel Ludovic Samanos,
de la cellule d'aide aux blessés de l'armée de terre (CABAT).
Difficile, néanmoins, de savoir combien ils sont au sein du régiment castelsarrasinois.
«Je n'ai pas le droit de vous dire leur nombre, mais ce que je peux vous confirmer,
c'est que pas un régiment n'est épargné»,
certifie le chef de corps du 31e RG, le colonel Guillaume Venard,
qui a accepté, avec l'accord de sa hiérarchie, de nous laisser échanger
avec des blessés de guerre psychiques de son régiment
et les principaux professionnels qui les accompagnent :
les psychiatres militaires de l'hôpital d'instruction des armées Robert-Picqué,
à Bordeaux, et l'adjoint du chef de la CABAT,
à Paris.
Une première pour le régiment et un sujet d'autant plus sensible,
pour ne pas dire tabou, que le témoignage livré à un grand quotidien du soir,
en 2010, d'un sergent revenu d'Afghanistan n'a pas laissé que de bons souvenirs.
«Il disait que le 31e l'avait laissé tomber alors qu'il s'était de lui-même coupé du régiment.
Ce qu'il nous a toutefois appris,
c'est qu'un personnel non combattant pouvait être atteint d'un SPT»,
assure le colonel Venard.
Une situation qui oblige le chef de corps à faire face à une double problématique :
maintenir la cohésion collective et assouplir
le règlement militaire au profit des blessés psychiques de sa garnison.
Que faire, en effet, lorsqu'un militaire refuse de se lever un matin,
devient asocial, agressif, voire addict à l'alcool?
«Le plus difficile avec un SPT,
c'est cette difficulté à avoir des relations non conflictuelles.
Ce qui est déstabilisant pour tout le régiment»,
confirme le colonel, qui sait que chaque blessé est un cas particulier.
Et les statistiques sont implacables :
75% des militaires français atteints d'un SPT quittent l'armée.
Un chiffre qui prend d'autant plus de relief
que les deux tiers des blessés physiques reprennent,
après leur guérison, leur vie régimentaire.
Un vrai casse-tête pour l'armée qui, depuis 2009,
a pris à bras-le-corps cette problématique.
Une expérience pionnière dans le suivi médical et social qui profite aujourd'hui au soutien des nombreux civils blessés psychologiques des attentats.
Le chiffre : 1400
cas répertoriés>De syndrome de stress post-traumatiques (SPT).
Depuis 2010,
c'est le chiffre total des militaires blessés psychiques enregistré par l'armée française.
Un nombre qui n'a cessé de progresser
à mesure que l'armée française est engagée
sur de multiples théâtres de guerre.
Au moins 12% des soldats en OPEX depuis décembre 2013,
en RCA, seraient atteints de SPT.
«75% des militaires français atteints d'un SPT quittent l'armée»