La semaine passée, le Pakistan a annoncé qu’il enverrait un millier de soldats en Arabie Saoudite, sans donner de précisions sur leur mission. Et cela a provoqué une crise politique intérieure, le ministre pakistanais de la Défense, Khurram Dastgir Khan ayant été menacé de poursuites pour « outrage au Parlement », en raison de son refus de donner les raisons de ce déploiement.
Et pour cause. Même si l’Alliance militaire islamique, créée à l’iniative de l’Arabie Saoudite pour combattre le terrorisme, est commandée par le général pakistanais Raheel Sharif, il n’est pas question pour Islamabad de s’impliquer militairement dans les opérations conduites par la coalition sous commandement saoudien au Yémen.
Il y a trois ans, le Parlement pakistanais s’était en effet opposé à une telle demande adressée par Riyad au monde musulman sunnite, estimant que le Pakistan ne devait pas prendre le risque d’être entraîner dans une lutte régionale pour le pouvoir. En outre, le pays, dont la population comprend une minorité chiite importante, partage une frontière avec l’Iran.
D’où cette crispation des parlementaires à l’anonce de l’envoi de soldats pakistanais sur le sol saoudien (en plus de ceux chargés de la surveillance des lieux saints de l’Islam), certains soupçonnant le gouvernement de vouloir passer outre le vote des députés. Qui plus est, le président du sénat pakistanais, Raza Rabbani, n’a pas apprécié d’en avoir été informé par une simple communiqué de presse. C’est une « insulte de la part de l’exécutif contre le pouvoir législatif », a-t-il dit.
La décision d’envoyer ce contingent de 1.000 soldats en Arabie Saoudite aurait été annoncée après une rencontre entre le général Qamar Javed Bajwa, le chef d’état-major de l’armée pakistanaise, et Nawaf Saeed Al-Maliki, l’ambassadeur saoudien au Pakistan, à Rawalpindi. D’après Asia Times, elle était dans l’air depuis un moment déjà.
Selon les explications données par Khurram Dastgir Khan, l’envoi de de ces soldats pakistanais aurait été demandé par Riyad pour une mission d’entraînement et de formation au profit de leurs homologues saoudiens. Et en aucun cas il est question de les envoyer ailleurs qu’en Arabie Saoudite [comprendre : au Yémen]. Mis sur le grill par les sénateurs, il n’a cependant pas voulu donné les « détails opérationnels » de cette mission, ni le lieu où elle sera menée. « La Chambre n’est pas satisfaite de vos réponses », a rétorqué Raza Rabbani.
Plus tard, le ministre pakistanais de la Défense a tenté de justifier ce déploiement avec un communiqué rappelant l’histoire des relations militaires entre le Pakistan et l’Arabie Saoudite pendant 50 ans. Ces dernières sont notamment régie par le « Pak-Saudi Protocole » qui, signé en 1982, prévoit l’entraînement des forces saoudiennes par l’armée pakistanaise.
Depuis, « 10.000 membres des forces armées saoudiennes ont été formés dans diverses académies et institutions de formation au Pakistan », a-t-il fait valoir. « L’assistance fournie à l’Arabie saoudite s’inscrit dans le prolongement de cet appui ainsi que dans le cadre de la résolution parlementaire d’avril 2015 [celle ayant refusé la participation du Pakistan aux opérations au Yémen, ndlr], a-t-il ajouté.
Photo : soldat pakistanais