Décès de Margot Duhalde, seule femme pilote des Forces françaises libres
Seule femme pilote des Forces françaises libres pendant la Seconde Guerre Mondiale, Margot Duhalde, vient de s’éteindre à Santiago du Chili à l’âge de 97 ans.
La passion de l’aviation aura été le moteur de Margot Duhalde, à une époque où il n’était guère facile pour une femme de devenir pilote. « Je disais ‘avion’ avant de dire ‘maman’, selon ma mère » et « aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours voulu voler », avait-elle confié dans un entretien qu’elle avait donné à l’AFP, l’an passé.
Née le 12 décembre 1920 à Rio Bueno [Chili] au sein d’une famille paysanne aux origines basques, Margot Duhalde a tout juste 16 ans quand elle parvient à convaincre ses parents de la laisser partir pour Santiago, où elle compte apprendre à piloter.
Seulement, elle ne reçoit pas l’accueil qu’elle imaginait à l’Aéro-club de Santiago. Mais sa rencontre avec César Copetta, un Français expatrié qui fut le premier à avoir piloté un aéroplane au Chili, en 1910, sera déterminante.
À l’aube des années 1940, Margot Duhalde compte une cinquantaine d’heures de vol à son actif. Alors que la guerre fait rage sur le Vieux Continent, elle décide de rejoindre le général de Gaulle. Au consulat de la France libre à Santiago, cachant un problème de vue (elle est astigmate), elle s’engage en tant que pilote. Elle quitte donc le Chili pour Buenos Aires, où elle embarque à bord d’un bateau devant rallier Liverpool, en mai 1941.
En Angleterre, où elle doit composer avec les différences culturelles, Margot Duhalde connaît une nouvelle déception : les Forces aériennes françaises libres (FAFL) refusent de l’admettre pour combattre. Après des semaines intensives de formation, au cours desquelles elle apprend à piloter des avions de combat, elle est donc affectée à l’Air Transport Auxiliary (ATA), une unité chargée de convoyer les avions neufs ou réparés pour le compte de la Royal Air Force.
« Notre mission était de dégager les usines, le plus vite possible, pour que les Allemands ne les bombardent pas. En une journée, nous pouvions piloter cinq sortes d’avions différents », expliquera-t-elle plus tard.
Pour ces missions de convoyage, les pilotes de l’ATA ne recevaient qu’une formation théorique sur les appareils devant leur être confiés… À eux de se débrouiller ensuite avec les indications des manuels techniques.
Au total, Margot Duhalde aura pris les commandes de « plus de 1.500 appareils anglais ou américains et de tous types, chasseurs, bombardiers, avions de transport et d’instruction » et elle « demeure la seule pilote militaire française ayant opéré en tant que Ferry Pilot pendant la Seconde Guerre mondiale », souligne l’article « Femmes et pilotes militaires dans l’armée de l’Air », publié par la Revue historique des armées.
Ayant accumulé les heures de vol (mais aussi les accidents – au moins une dizaine), Margot Duhalde retrouve le Chili après la guerre. Forte de son expérience, elle rejoint la compagnie aérienne Lipa-Sur, puis la force aérienne chilienne (Fuerza Aérea de Chile – FACH), au sein de laquelle elle obtiendra ses galons de colonel.
En 2006, Margot Duhalde a été promue commandeur de la Légion d’Honneur par le président Chirac.
« Nous apprécions la grande contribution qu’elle a apportée à l’aviation chilienne et nous reconnaissons son courage pour réaliser son rêve de toute une vie, briser les stéréotypes et montrer la voie à d’autres femmes », a commenté le gouvernement chilien, à l’annonce de son décès.
La Fuerza Aérea de Chile a souligné « ses grandes qualités personnelles, qui la rendaient digne de l’estime de ceux qui l’entouraient et les membres de notre institution. »