Les ventes des 100 premiers industriels mondiaux de l’armement ont progressé de 1,9% en 2016
Le rapport annuel de l’Institut international de recherche sur la paix de Stockholm (Sipri) sur les ventes d’armes des 100 plus importants groupes mondiaux d’armement et de services à caractère militaire est à relativiser dans la mesure où les industriels chinois n’y figurent pas. Ce qui ne permet pas d’avoir une idée complète et précise des ventes d’armes réalisées dans le monde. Toutefois, ce document, publié depuis 1989, permet de dégager quelques tendances.
En 2015, le chiffre d’affaires global des groupes figurant dans ce top 100 était en recul de 0,6%, principalement en raison d’un recul des ventes des industriels américains de l’armement, lesquels dominent largement le classement établi par le Sipri (sur les 10 premières place, 6 sont occupées par des groupes d’outre-Atlantique).
La tendance s’est donc retournée en 2016, avec une hausse de 1,9% du chiffre d’affaires global des groupes classés dans ce top 100, avec un montant total de 374,8 milliards de dollars. Si l’indicateur du Sipri était influencé, en 2015, par les performances des industriels américains, cela a été encore le cas l’an passé.
En effet, ces derniers ont vu leurs résultats progresser 4%, pour un chiffre d’affaires de 217,2 milliards de dollars. Premier du classement, loin devant Boeing (2e), Lockheed-Martin a vu ses ventes augmenter de 10,7%, en partie grâce au marché américain.
« Avec l’aquisition du producteur d’hélicoptères Sikorsky fin 2015 et des volumes de livraison plus élevés d’avions de combat F-35, Lockheed-Martin a enregistré une croissance significative de ses ventes d’armes en 2016 », explique Aude Fleurant, Directrice du programme Armements et Dépenses militaires du Sipri.
« La hausse des ventes ainsi que le nombre d’entreprises américaines de service à caractère militaire listées dans le Top 100 du Sipri sont des tendances frappantes en 2016. Certaines de ces entreprises ont augmenté leurs ventes grâce à l’acquisition de divisions de service à caractère militaire des plus grands producteurs d’armes », souligne l’institut suédois. Tel a été le cas, par exemple, de Leidos, qui a mis la main sur les activités informatiques et technique de Lockheed-Martin.
Les industriels européens sont plus à la peine, avec 91,6 milliards de dollars de ventes. Quatre figurent dans le top 10, dont le britannique BAE Systems, Airbus, l’italien Leonardo et le français Thales. Leurs ventes ont progressé de seulement 0,2% en 2016. Mais leur situation est disparate.
Les groupes français se maintiennent, après avoir vu leurs résultats fortement progresser en 2015 (+13,1% cette année-là) tandis que leurs concurrents européens marquaient le pas. L’année dernière, les industriels allemands et britanniques ont su tirer leur épingle du jeu.
« L’augmentation de 6,6% des ventes d’armes de l’Allemagne en 2016 est principalement due à la croissance des ventes du fabricant de véhicules blindés Krauss-Maffei Wegmann (+12,8%) et du fabricant de systèmes terrestres Rheinmetall (+13,3%) », précise Pieter Wezeman, chercheur principal au Sipri.
Selon ce dernier, Krass-Maffei Wegmann, désormais associé au français Nexter Systems, et Rheinmetall ont profité de la demande en armement en Europe, au Moyen-Orient et en Asie du Sud-Est.
La progression des ventes d’armes britanniques est plus modeste, avec seulement +2%. Si les résultats de BAE Systems restent stables, cette hausse est due à d’autres acteurs, comme le fabricant de composants aérospatiaux GKN, dont le chiffre d’affaires a bondi de 43,2%.
Après une hausse de 6,2% en 2015, les ventes d’armes des groupes russes figurant dans le top 100 ont augmenté de 3,8% au cours de l’exercice suivant. Mais le rythme de leur progression semble ralentir.
« Les difficultés économiques majeures qu’a connues la Russie en 2016 ont contribué à ralentir le rythme de croissance des ventes d’armes russes », relève en effet M. Wezeman, qui était arrivé à la même conclusion lors du rapport publié il y a un an.
Dans le détail, la situation est différente selon le secteur d’activité. Sur les 10 entreprises russes classées dans le top 100, cinq ont vu leurs ventes progresser, parfois significativement, comme United Aircraft Corporation (+15,6%, 13e place) tandis que les cinq autres ont obtenu des résultats décevants.
Parmi les pays émergents, les industriels sud-coréens confirment la tendance constatée dans rapport publié par le SIPRI en décembre 2016. La situation tendue dans la péninsule coréenne et la hausse de la demande dans les pays asiatiques (voire européen) font que ces derniers ont vu leurs vente s’envoler de 20,6%, pour un chiffre total de 8,4 milliards de dollars.
Désormais, six industriels sud-coréens de l’armement figurent dans le classement du Sipri. « La perception continue et grandissante des menaces [en particulier celle de la Corée du Nord] pousse la Corée du Sud à l’achat d’équipements militaires et à se tourner de plus en plus vers sa propre industrie pour répondre à sa demande en armements », relève l’institut suédois.
Longtemps dépendant des armements américains, la Corée du Sud cherche non seulement à se procurer ses propres équipements militaires mais aussi à devenir un pays exportateur. Et les progrès sont très rapide. En 2006, ses exportations d’armes s’élevaient à seulement 253 millions de dollars. Dix ans plus tard, ces dernières ont atteint les 2,5 milliards.
A contrario, et alors que l’on aurait pu penser que l’assouplissement de la législation allait leur permettre de doper leurs exportations, les industriels japonais de l’armement ne sont pas arrivés à augmenter leurs ventes en 2016. Et ils ne profitent même pas de la hausse significatives des dépenses militaires nippones, décidées dans un contexte marqué par des tensions régionales (avec la Corée du Nord et la Chine). Ainsi, selon le Sipri, leur vente ont baissé de 6,4%, en raison de contre-performances des entreprises les plus importantes du secteur, dont Mitsubishi Heavy Industries (-4,8%), Kawasaki Heavy Industries (-16,3%) et Mitsubishi Electric Corporation (29,2%).
Photo : David Monniaux, via Wikipedia