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| histoire du PUTSCH | |
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Invité Invité
| Sujet: histoire du PUTSCH Mer Avr 23 2008, 14:07 | |
| 18 Avril 1961 : Troisième réunion du comité de Vincennes, animé par Soustelle, qui regroupe tous les partisans de l'Algérie Française. Le comité dénonce la politique d'abandon menée par les gaullistes (dont beaucoup de ses membres sont issus, le reste étant des socialistes). Ils concluent leur meeting en proclamant : "nous servons la loi, c'est le pouvoir qui l'enfreint". 19 Avril 1961 : La prise d'Alger est au point, Lacheroy en est le maître d'œuvre, Challe doit arriver le lendemain. Argoud raconte comment il y a participé: 20 janvier. « Le capitaine Heissat, un ancien du 3e R. C. A., arrive d'Alger. Il me transmet un message du lieutenant-colonel de la Chapelle, qui se met à ma disposition. 22 janvier. Le colonel Brothier, qui commande le 1er R. E. I. à Sidi-Bel-Abbès, est venu en 6e région militaire pour régler des problèmes de recrutement. Il m'apporte des renseignements sur l'état d'esprit des régiments de la Légion. "Neuf sur dix des régiments sont prêts à s'engager sur le nom de Massu. Si Massu ne vient pas, ils s'engageront sur le nom de Broizat et sur le vôtre. Si vous voulez faire une tournée en Algérie, donnez-moi votre tour de tête. Je vous ferai traverser la Méditerranée habillé en légionnaire. Une fois là-bas, vous pourrez vous déplacer comme vous l'entendrez." Il est difficile d'être plus catégorique. 30 janvier. Le colonel Callet m'appelle de nouveau à Paris. A 16 heures, réunion à l'École de guerre. Y assistent Faure, Vaudrey, Lacheroy, Broizat, Chateau, Callet et de Blignières. Faure nous demande si nous sommes d'accord pour tenter l'opération à Alger avec lui dans les quarante-huit heures. Moyens: le I8e R.C.P. et le commando Robin. C'est précisément la solution dont nous ne voulons à aucun prix. Le délai imparti est une plaisanterie. Broizat et moi réagissons vivement. Dans l'après-midi, devant un comité restreint, je précise que je refuse d'accepter Faure comme patron. 4 février. Je vois le général de Bollardière chez son cousin à Strasbourg. Il m'accueille courtoisement. Il me demande mon avis sur la situation en Algérie et sur la politique de De Gaulle. Il est très troublé. Il reconnaît que De Gaulle a fait de nombreuses erreurs, qu'il a menti sans arrêt depuis trois ans, que le dernier référendum est une escroquerie. Il n'en soutient pas moins, et c'est là que nous nous séparons, que, les choses étant ce qu'elles sont, la politique suivie actuellement par De Gaulle est la seule praticable. L'erreur du général de Bollardière est de croire que Ferhat Abbas et ses successeurs, Bourguiba, et Mohammed V, tiendront compte à la France de sa générosité, et que celle-ci retrouvera, sur les plans intellectuel et économique, ce qu'elle a perdu sur les plans militaire et politique. 14 février. Le commandant Guizien, qui commande le quartier d'Edgar-Quinet, vient en permission à Metz. En cas de coup dur, il s'engage à se battre à mes côtés avec son bataillon de harkis. Il tiendra sa promesse. 20 février. Je vois M. Lacoste chez le commandant Loustau. M. Lacoste est dans l'ensemble d'accord avec nous. Mais il ne paraît pas avoir compris la philosophie de la guerre subversive. Il affirme que, s'il se produit un coup de force à Alger, le Gouvernement sera contraint de céder. A 18 heures je me rends à la Maison de l'Amérique latine. J'y retrouve M. Soustelle, le général de Beaufort, Vaudrey, Broizat. M. Soustelle analyse rapidement la situation. Il nous décrit les projets de De Gaulle sur le partage de l'Algérie. Le général de Beaufort intervient à plusieurs reprises pour l'appuyer. In fine, j'interviens pour replacer le problème dans son véritable cadre. "Seul un coup de force peut sauver l'Algérie. L'armée est mûre. Il ne peut plus y avoir de progrès. Le problème numéro un qui se pose est celui du chef. Il doit être résolu par priorité: Or il n'y a pas beaucoup de choix. L'heure du déclenchement est fonction de l'opportunité." Ils approuvent, mais personne ne propose de candidat. 7 mars. Je rencontre par hasard le général Vézinet dans le hall du cercle militaire. L'entretien est très sec. Je lui fais part de mes sentiments: "J'ai honte de ma tenue d'officier, de ma qualité de Français. - C'est fichu. Ma seule ambition est de sauver les meubles. Je ne vis plus que sur les nerfs", m'avoue-t-il. Il me fait pitié. Je revois Mirambeau et Beaufort à 17 heures. Ils sont tous deux pessimistes, Beaufort surtout; De Gaulle veut l'indépendance de l'Algérie, assure-t-il. 9 mars. Je vois longuement le lieutenant-colonel de la Chapelle à Paris. Il me réaffirme sa décision de s'engager à mes côtés. "Avec ou sans Massu, quatre régiments sont prêts à marcher avec vous: ceux de Masselot, de Lecomte, de Lenoir et le mien." Il me donne un avis réconfortant sur les généraux Gouraud et Ducourneau. Je suis chez Massu à 15 heures 30 avec Broizat. La scène que nous allons vivre est l'une des plus affreuses que j'aie jamais connues. Tout le travail, que nous imaginions avoir effectué dans son esprit, est à terre. Il nous parle de la solution de De Gaulle, de l'indépendance de l'Algérie, de la possibilité pour les pieds-noirs d'y demeurer, si nécessaire en coiffant le fez. Nous lui disons, Broizat et moi, ses quatre vérités: "Ce n'est pas pour notre plaisir que nous venons vous voir, et que nous avalons vos grossièretés, mais tout simplement parce qu'il n'y a pas pour l'heure d'autre chef possible. - Vous ne m'avez pas convaincu. Votre solution ne débouche sur rien. C'est un baroud d'honneur, une folie. - Nous tenons autant que vous à la vie, à notre famille. Nous nous engageons avec vous. C'est une garantie. - J'envisage la possibilité de servir d'adjoint à Gambiez." Nous lui rions au nez. Je lui souligne les mensonges, les palinodies de tous nos chefs depuis quinze ans. Broizat me fait signe que nous perdons notre temps Nous le saluons et partons. Je ne l'ai jamais revu. Le lieutenant de la France Libre, le commandant de la division Leclerc, le général du 13 Mai, l'idole des Algérois, qui a crié cent fois "Vive l'Algérie française!", le chef sous les ordres duquel des dizaines d'officiers se sont fait tuer pour cette cause, évoque aujourd'hui, d'un coeur léger, l'indépendance. Si loin que je sois arrivé dans le mépris des hommes, je ne l’avais pas cru, si je ne l’aurais entendu de mes oreilles. Mme Massu a gagné. Durement travaillé au corps pendant un an, il a trahi tout ce à quoi il croyait hier. Non pas par intérêt ou par manque de courage physique, mais tout simplement parce que cette rude écorce, ce masque de conquistador cèlent l'indécision, la faiblesse de pensée. Le couple ira plus loin encore sur le chemin... de la contradiction. Nommé gouverneur de Metz après le putsch, en récompense de son abdication, oubliant qu'il a déserté lui-même en 1940, il invitera ses subordonnés à pourchasser ses anciens camarades clandestins, au nom de l'obéissance. Il refusera de venir témoigner en faveur de son ex-aide de camp, le lieutenant Godot. Mais, dans le même temps, il acceptera de recevoir au Palais du gouverneur un membre de l'OAS, venu lui demander de l'argent et des armes. Il refusa certes d'accéder à sa requête, mais il s'en excusera, excipient de l'impuissance à laquelle il est condamné. Quelques mois avant ma libération, Mme Massu rendra visite à ma famille pour lui assurer que "le général me considère toujours comme son propre fils". La place est nette désormais. Trois officiers généraux restent volontaires: Salan, Jouhaud et Faure. Mais sur aucun des trois noms, pour des raisons différentes, l'armée ne s'engagera: Faure, à cause de son manque de sérieux, Jouhaud, parce qu'il n'est pas connu des officiers de l'armée de terre, Salan, parce qu'il n'inspire pas confiance. Tous les autres, à commencer par le maréchal Juin, se dérobent, avec des alibis dont la subtilité est à la mesure de leurs facultés intellectuelles. Juin porte en l'occurrence une responsabilité écrasante. Il est maréchal de France, donc le chef de l'armée. De surcroît, il est pied-noir. Il est né à Bône. Sa femme est née à Constantine. Ses convictions sont les nôtres. Il connaît bien De Gaulle. Il sait que l'indépendance avec lui est inéluctable. S'il s'est montré un remarquable chef de guerre, il n'a jamais fait preuve d'un caractère à la hauteur de son intelligence. C'est ainsi qu'en 1950 il a refusé en Indochine le poste que de Lattre acceptera. Mais cette fois, l'enjeu est de taille. Il s'agit de l'intégrité du sol national et de sa patrie. Il se borne à des demi-gestes. Le II Novembre 1960, il s'abstient d'assister aux cérémonies officielles. Il entend par là, explique-t-il, "malgré l'amitié cinquantenaire qui l'a lié au général De Gaulle, protester en sa qualité de plus haut dignitaire de l'armée et en tant qu'Algérien contre l'idée d'abandonner nos frères algériens". Mais cela n'ira pas plus loin. Il refusera toujours de franchir le Rubicon. En 1962, le président Bidault lui adressera un ultime message, le pressant de prendre position à ses côtés. Fatigue des ans, répugnance à quitter une cage dorée? Il ne répondra pas. Le cas des officiers généraux étant entendu, reste le problème des hommes politiques. Je n'en connais guère. N'ayant jamais éprouvé de sympathie particulière pour le système, sa pompe et ses oeuvres. Mais aucun de ceux que j'approche n'envisage qu'il puisse prendre la tête du mouvement. C'est aux militaires qu'il appartient de réaliser le coup de force. Le temps des politiques viendra ensuite, s'il y a des marrons à tirer du feu. Parmi la lignée de supporters de l'Algérie française, deux hommes politiques seulement rejoindront nos rangs: le président Bidault et Jacques Soustelle. Eternelle lâcheté humaine. Tant que l'obstacle a été loin, les déclarations ont été catégoriques, les engagements solennels, dignes de l'antique. Maintenant que nous sommes au pied du mur, l'un trouve qu'il est trop tôt, l'autre qu'il est trop tard. Le troisième ne peut marcher que si le quatrième est présent, le cinquième nous sera beaucoup plus utile à Paris. De Gaulle a fait la même constatation lorsqu'il était à Londres, pendant l'été 1940. Ceux auxquels nous posons la question ne nous pardonneront pas de les avoir contraints de se renier. Nos seuls amis restent ceux auxquels nous ne nous sommes pas ouverts, et qui, le front haut, pourront nous reprocher de ne pas avoir fait appel à eux. Tous, bien entendu, critiqueront après coup notre action, y décelant cent erreurs, qu'ils n'auraient jamais commises. Il faudrait en rire, si le sort de l'Algérie, la vie de centaines de milliers d'hommes n'en avaient pas dépendu. |
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| Sujet: Re: histoire du PUTSCH Mer Avr 23 2008, 14:08 | |
| 10 mars. Nous n'avons plus le choix. Si nous voulons nous battre, il nous faudra nous contenter de colonels. Encore, les volontaires ne forment-ils pas une phalange serrée. On les compte sur les doigts d'une main... Je sais que c'est une folie. L'armée conclura que les officiers généraux se sont abstenus parce que nous n'avions aucune chance de réussir. Elle refusera de s'engager. Mais j'ai tellement souffert depuis deux ans de ces abandons, de ces volte-face, de cette impuissance, que je suis décidé à tout tenter. 12 mars. Le colonel de Blignières m'appelle à Paris. Je prends Godot en passant par Verdun. Blignières m'emmène chez des amis, I, bd Maréchal-Maunoury, près de la porte de Passy. J'y retrouve six jeunes officiers du 1er R.E.P., parmi lesquels le capitaine Sergent, le capitaine de la Forest-Divonne, le lieutenant Degueldre. Nous sommes trois colonels, de Blignières, Vaudrey et moi. Le colonel de Blignières est un officier de cavalerie, un aristocrate fin et racé. Fait prisonnier en 1940 en Belgique, il a tenté à plusieurs reprises de s'évader. Libéré en 1945, il se porta presque aussitôt volontaire pour l'Indochine, où il effectua deux séjours. Arrêté après le putsch, il passera plus de quatre ans à la Santé. Degueldre prend la parole. Il s'adresse particulièrement à moi. "Nous en avons assez des reculades des officiers généraux et des colonels, qui promettent beaucoup et ne tiennent rien. Nous n'avons plus confiance dans les généraux. Si les colonels ne veulent rien faire, nous sommes décidés à mettre le feu. - Je comprends votre état d'esprit, répliquai-je. C'est aussi le mien. Mais je ne puis marcher tout seul. Ce serait un suicide. J'accepte de prendre votre tête, si Broizat et Dufour se joignent à moi. - Mon colonel, je vous accompagne", dit Vaudrey. Degueldre revient à la charge: " Nous mettons trois compagnies du 1er R. E. P. à votre disposition. Si le 25 vous ne vous êtes pas décidés, nous déclencherons le mouvement. - Je ne veux pas m'engager sur une date précise. Si Broizat et Dufour acceptent, c'est moi qui fixerai l'heure et les conditions." 14 mars. Je rencontre Broizat à Châlons. Il estime que la présence de trois ou quatre colonels ne suffit pas. Je n'arrive pas à l'en faire démordre. "La situation politique n'est pas favorable. De Gaulle peut difficilement accorder l'indépendance au G.P.R.A. Les négociations ne peuvent aboutir. Il faut attendre. - Je ne suis pas sûr que De Gaulle n'aille pas jusqu'à l'indépendance. Car on ne peut plus lui accorder la moindre confiance. De plus, nous ne pouvons plus attendre. Au fur et à mesure que le temps s'écoule, les masses musulmanes, qui ne peuvent saisir les subtilités de ce processus, s'éloignent de nous. Il sera impossible de revenir en arrière." 20 mars. Vaudrey et Godot m'apportent des éléments nouveaux. Challe serait disponible. Le changement d'attitude de Challe me surprend. Mais, en quelques instants, je réfléchis à la situation nouvelle. Sa présence serait un atout sérieux. Elle risque d'entraîner nombre de ralliements parmi ses anciens subordonnés. Nos dissentiments passés ne doivent pas entrer en ligne de compte. "Si le général Challe marche, je le suivrai, affirmai-je. Quelle est la date envisagée? - Le 26 mars. Tout dépendra de l'arrivée du 1er R.E.P. à Zéralda. - Si la question du chef est réglée, il serait absurde de se lier par une date aussi rapprochée. Je n'ai pas le temps, en six jours, de prévenir le 1er R.E.P. et d'avoir sa réponse. Mais je veux être sûr de l'authenticité de la nouvelle." Vaudrey me promet une réponse pour le jeudi suivant 23. 23 mars. Je reçois une lettre de Vaudrey. Elle contient plusieurs précisions. L'affaire est reportée aux 1er, 2 ou 3 avril. La présence de Salan, Jouhaud, Faure, Gardy est acquise. Celle de Zeller et de Challe est probable. Brothier s'est engagé. Les régiments qui m'ont promis d'être à mes côtés ont été touchés directement. Je téléphone aussitôt à Blignières pour lui souligner le caractère impératif de la présence de Challe. 25 mars. Je mets le général Lecoq au courant. Il partage mon opinion. 27 mars. Je pars pour Paris à 8 heures. Une réunion a lieu à l'Ecole de guerre. Y assistent les généraux Jouhaud, Faure, Gardy, les colonels de Blignières, Godard, Broizat, le commandant Robin, le capitaine Sergent et Degueldre. J'apprends que la participation de Challe n'est pas encore acquise et que le 1er R.E.P. a été maintenu sur place par Gambiez. Jouhaud s'inquiète auprès de chacun de nous, pour savoir quelles unités marcheront dans un premier temps. Sans un minimum, ajoute-t-il, Challe ne s'engagera pas. Broizat souligne encore que, faute de Massu, la présence de Challe est indispensable. Jouhaud approuve Broizat. Il reconnaît bien volontiers qu'il n'a pas fait le poids en décembre. Degueldre nous prévient à nouveau que, si la hiérarchie déclare forfait, quelques camarades et lui sont décidés à sauver l'honneur. Le commandant Robin exprime son pessimisme sur l'état d'esprit de ses harkis, et surtout sur celui des hommes du contingent. Si nous ne nous décidons pas vite, un nouveau discours de De Gaulle peut encore réduire nos possibilités. Jouhaud clôt la séance. "J'informerai le général Challe de ce qui s'est dit au cours de cette réunion." 29 mars. De Blignières m'apprend que l'affaire est reportée, une fois de plus. Broizat me prévient que Challe nous recevra le lendemain, dans son appartement parisien. 30 mars. Nous y pénétrons à 13 heures 30. J'explique au général pourquoi nous venons le voir. Massu se récusant, nous nous tournons vers lui. Car, seul, il peut décider les officiers généraux. Nous avons envisagé un instant de tenter l'opération entre colonels, mais la probabilité du succès eût été très mince. Je lui décris ensuite notre plan. Prise d'Alger par une action directe conjuguée avec une intervention en provenance du Constantinois. C'est dans un deuxième temps que son action sera décisive. Il réagit assez violemment. Lui aussi a son plan. Il consiste en une grève généralisée de toutes les mairies de la Mitidja. Grève à l'intérieur des bâtiments administratifs, pouvant aller jusqu'à un combat à mort. C'est aberrant. Je lui dis, tout de go, que je considère son plan comme irréalisable. Nous nous heurtons alors au sujet des Européens d'Algérie. Il n'a toujours pas avalé son avanie du 24 janvier 1960 et il leur garde une rancune tenace. "C'est bien, nous accorde-t-il comme à contrecœur. J'accepte votre plan. Mais c'est moi qui commanderai et qui fixerai l'heure H." Il envisage un délai de plusieurs mois. Je lui expose alors les motifs qui militent en faveur d'une action plus proche. Il finit par admettre un délai de trois à six semaines. Il enchaîne: "Il me faut plusieurs milliards pour tenir trois mois. J'ai besoin d'une organisation très poussée: cellules dans les zones, secteurs. - Mon général, cette organisation est, elle aussi, irréalisable, étant donné les conditions du moment. - L'affaire doit être. bien montée sur Alger, avec quatre ou cinq régiments au minimum. - Ce qui vous a été proposé, quelques compagnies, me paraît très mince. Par contre, quatre régiments, c'est beaucoup trop, car il s'agit d'une action par surprise, de nuit. Je pense que deux régiments doivent suffire." Il ne paraît pas convaincu. En prenant congé, je lui pose la question de confiance: "Etes-vous irrévocablement décidé? - Oui, me répond-il. - Puis-je dire à La Chapelle que vous ne nous laisserez pas tomber? - oui". Encore une réunion à 18 heures à l'École militaire avec Jouhaud, Faure, Vaudrez, Broizat, Basset, Casati et Sergent. Faure expose les résultats de l'entrevue qu'il vient d'avoir avec Challe, Jouhaud, Zeller et Vanuxem chez M. Regard. Challe a laissé tomber ses exigences sur les mairies. Il accepte de prendre le commandement. C'est lui qui fixera l'heure. Faure demande alors quels sont ceux qui ne marchent qu'avec Challe, et ceux qui sont décidés à marcher en tout état de cause; Broizat et moi reprenons nos arguments. Jouhaud s'inquiète de savoir si La Chapelle s'engagera dans tous les cas. Je réponds qu'il ne s'engagera qu'avec moi. Il décide alors d'agir sur Challe, pour l'amener à s'engager dans des délais acceptables. 1er avril. Le G.P.R.A. refuse de venir à Evian le 7 avril. 9 avril. Le lieutenant de Labigne m'apporte un mot de de Blignières. Challe, Massu et Gracieux seraient d'accord. La nouvelle m'apparaît digne de foi. II avril. De Gaulle donne une conférence de presse. Le ton est amer, équivoque, sordide. C'est le ton d'un marchand de tapis et non plus celui d'un constructeur d'empire. Il envisage, cette fois, de larguer l'Algérie, purement et simplement. "La France n'a aucun intérêt à porter à bout de bras l'existence des populations dans une Algérie qui n'offrirait rien en échange de ce qu'elle aurait a demander. C'est pourquoi la France considérerait avec le plus grand sang-froid et d'un coeur tranquille que l'Algérie cessât d'appartenir à son domaine." Juste un mot, à la fin, pour ceux qui sont sur le terrain: "Nous inviterons à quitter les territoires intéressés ceux de nos nationaux qui courront vraiment trop de risques. Nous aurions à les regrouper en assurant leur protection. Quant à ceux qui auraient la tentation de prendre notre relève, je leur souhaite bien du plaisir." 12 avril. J'ai rendez-vous à Paris avec le général Blanc, ancien chef d'état-major de l'armée, conseiller d'Etat aux missions extraordinaires. Le général Blanc m'emmène chez M. Massenet, ancien igame de Lyon, alors président de la R.A.T.P. M. Massenet nous accueille dans son bureau, au bord de la Seine. Son analyse générale du problème recoupe la mienne. Il parle longuement et en particulier du problème administratif. Il se refuse à nous accompagner en Algérie dans un premier temps. Il nous sera plus utile à Paris. Un de plus qui est prêt à nous aider de ses conseils. A 18 heures, dernière réunion à l'École de guerre. Le général Faure nous annonce que Challe a décidé la date du 19 ou du 20. Il ajoute que Challe veut arriver à la dernière minute avec Broizat, Godard et moi. "Nous devons tous arriver en même temps. Je dois pouvoir affirmer aux camarades que le général Challe est là, et que je l'ai vu", déclaré-je. Tous m'approuvent. Faure me prend alors à part pour me demander des explications sur les réticences dont j'ai fait preuve à son sujet. Je lui réponds qu'elles proviennent de ce qu'il ne fait pas le poids auprès des camarades. Nous évoquons le problème de la déclaration que Challe fera à Alger. Il a manifesté l'intention de la rédiger dans l'avion. J'aimerais qu'elle nous soit soumise auparavant. Broizat m'approuve. 13 avril. Je rends compte au général Lecoq et au général Constans. 17 avril. Une lettre de Broizat m'apprend que l'affaire est prévue pour la nuit du 20 au 21. Le colonel Lacheroy est parti en élément précurseur. Le général Challe et le général Zeller n'arriveront à Alger que dans la soirée du 20.
Quinze mois se sont écoulés depuis les barricades. Trente-cinq mois, depuis mai 1958, jalonnés par les déclarations du , chef de l'Etat. Chacune de ces déclarations a annulé la précédente, en tout ou en partie. r. II a fallu trois ans à De Gaulle pour passer de l'Algérie française à l'abandon vulgaire. Cette longue période de reniements n'a provoqué aucun remous sérieux en France. De Gaulle a spéculé en artiste sur la veulerie de ses compatriotes. Les Français, l'intelligentsia, le monde politique, les syndicats à leur tête, lui ont, à une large majorité, donné un quitus de sa gestion et un blanc-seing pour l'avenir. Ils partageront donc collectivement la responsabilité du crime commis. En face, le nombre des partisans de l'Algérie française s'est réduit comme la peau de chagrin. Lorsqu'il est apparu assuré que seul un coup de force pouvait sauver l'Algérie des milliers d'opposants par le verbe, il n'est plus resté que quelques douzaines d'hommes prêts à risquer leur vie. II a fallu près de six mois d'efforts pour trouver un chef à l'entreprise, qui réunît les conditions minimales exigibles. Un seul s'est présenté. Il n'y a pas eu de choix. C'était lui ou rien. La politique de De Gaulle a enfanté les violences des barricades, celles du putsch. La décadence française a réalisé les conditions de leur échec. » Antoine Argoud, "La décadence, l'imposture et la tragédie" Fayard 1974. |
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| Sujet: Re: histoire du PUTSCH Mer Avr 23 2008, 14:09 | |
| 20 Avril 1961 : Arrivent à Alger par un avion militaire les généraux Challe et Zeller et le colonel Broizat. Ils sont accueillis par les colonels Robin (le seul avec encore un commandement en algérie, l'armée a été considérablement épurée) et Lacheroy, lui arrivé il y a quelques jours à Alger par un avion régulier. Pendant toute la journée du 21, Challe reçoit dans le PC de Robin les responsables militaires de la région, en particulier le commandant de Saint Marc, ancien de Buchenwall et d'Indochine, commandant par interim du premier régiment étranger de parachutiste, remplaçant le colonel Guiraud, opportunément en permission. Tous les lieutenants de ce régiment (dont le lieutenant Degueldre, muté en France, déserteur, revenu clandestinement) sont au courant de la tentative désespérée qui va avoir lieu, Degueldre se fait fort de manœuvrer le premier R.E.P. si Saint Marc refuse, Saint Marc accepte, le R.E.P. ira au coup de force en unité constituée. Voici comment dans le livre Blanc de l'armée française en algérie, Hélie de Saint Marc raconte son engagement: "J'étais alors commandant, adjoint au colonel commandant le 1er régiment étranger de parachutistes. Revenant à notre base arrière, après quelques opérations, mon colonel, dont la famille réside en métropole, prend quelques jours de permission. Au moment de monter dans l'avion, à Maison-Blanche, il me prend par les épaules en me disant: "Saint Marc, je vous confie le régiment. Nous vivons une époque tragique où il n'est pas facile, pour un honnête soldat, de savoir où est le droit chemin." Il ne pensait pas si bien dire. Quelques jours plus tard, un civil algérois - européen - vient me voir et me dit: "Mon commandant, le général Challe est revenu clandestinement à Alger. Il veut vous voir de toute urgence." Le général ChaIle avait commandé toutes les troupes françaises en Algérie, et les avait menées à la victoire. Ensuite, en désaccord avec le général De Gaulle, il avait donné sa démission, et on lui avait interdit de revenir sur le territoire algérien. Je le connaissais pour avoir été son officier opérations dans le cadre de la lOe DP, et j'avais pour lui de l'admiration, du respect et de l'amitié. J'ai donc tout de suite compris qu'il allait me proposer quelque chose de grave, et j'ai senti au plus profond de moi-même cette douleur physique que l'on éprouve, au début des combats, lorsqu'on entend siffler les premières balles, crépiter les premières rafales. Je me suis donc rendu à la convocation du général Challe, qui m'a reçu dans une villa des hauts d'Alger. On m'a fait entrer dans une pièce où il était seul derrière une table, en civil, avec son blouson d'aviateur, sans aucun insigne de grade. Il avait le regard fatigué, les traits tirés, et j'ai deviné le poids terrible qui pesait sur ses épaules. Il m'a dit: "Saint Marc, je vais vous demander quelque chose de terrible." Il l'a dit à deux reprises. " Vous commandez actuellement le 1er REP et moi, cette nuit, je m'apprête à entreprendre une action illégale contre le gouvernement de mon pays, parce que j'estime que ce gouvernement trahit l'armée - cela n'est encore pas trop grave, elle en a l'habitude - mais aussi les populations auxquelles nous avons promis notre protection. Dans quelques jours, quelques semaines, ce gouvernement va signer avec les représentants de la rébellion qui sont à Tunis un accord au terme duquel nous devrons quitter l'Algérie et livrer ces populations au massacre ou à l'exil collectif. Je vais donc entreprendre cette action pour m'y opposer. J'ai besoin de vous. J'ai peu de temps à vous accorder: je voudrais savoir si vous êtes avec moi ou contre moi." Je lui ai posé quelques questions, auxquelles il a répondu. Puis il y a eu entre lui et moi un long silence au cours duquel, comme dans un éclair, j'ai revu des mains qui se crispaient sur les ridelles d'un camion: les mains de mes partisans que j'avais abandonnés, et les crosses abattues sur ces mains pour leur faire lâcher prise. - Je lui ai dit: "Mon général, je me mets à vos ordres, et je pense que le 1er REP me suivra." En quelques secondes, j'étais passé du statut d'un officier discipliné et légaliste à celui d'un rebelle passible de douze balles dans la peau dans les fossés du fort de Vincennes. Sur la lame du rasoir, j'avais fait basculer mon destin.
Voici la version donnée par Jean Brune dans son livre " interdit aux chiens et aux français ", éditions Atlantis: C'était le jeudi 20 avril 1961, à une heure du matin. Un avion avait atterri tous feux éteints sur la base aérienne de Blida, à cinquante kilomètres d'Alger. Après avoir paru hésiter, il était allé se ranger en bordure des fossés qui séparent la route des champs d'atterrissage; des ombres en étaient descendues. El1es confabulaient avec d'autres ombres qui attendaient les étranges voyageurs dans la nuit parfumée de senteur d'orangers. Le ciel était pur, givré de milliards d'étoiles, et l'énorme masse de l'Atlas se profilait sur ce scintillement de vivier, comme une muraille coupée par la brèche de la Chiffa. L'un des hommes qui revenait ainsi clandestinement en Afrique y avait commandé en chef. Il s'appelait Challe. Il était accoutumé, quand il descendait des avions militaires, à recevoir l'hommage des fanfares éclatant dans un brusque déchirement de cuivres, et à passer en revue les piquets de parade. Ce soir, sa silhouette lourde se découpait sur les étoiles à côté de celle du colonel Broizat et de l'ombre plus frêle du général Zeller qui venaient de débarquer avec lui. Challe avait demandé : - Où en sommes-nous ? On lui avait expliqué que le projet de coup de force prévu contre Alger, pour ce soir-là, avait été remis à la nuit suivante et Chal1e s'était emporté. - Comment, rien n'est déclenché ? Rien n'était déclenché. Les officiers qui avaient accepté la tâche de s'emparer d'Alger, refusaient d'engager l'action avant d'être assurés que Challe était réellement revenu en Afrique et qu'il était prêt à prendre le commandement de l'aventureuse entreprise. Mais l'ancien chef des forces armées d'Afrique se réveillait en Challe. Il dit : - Vous allez apprendre à obéir . Le colonel Broizat avait alors enlevé ses lunettes dans un geste qui lui est familier lorsque ce qu'il a à dire revêt une gravité particulière. - Il faut les comprendre, répondit-il à Challe. Ils ont déjà beaucoup été déçus par les généraux. La remarque était si juste que quelques semaines avant, à Paris, Roger Degueldre avait exigé qu'un officier supérieur vînt en Algérie en attendant le déclenchement du coup de force, comme un otage. On avait cédé. Et ce soir Challe arrivait à son tour sur les terres en délire dans la paix d'une nuit de printemps. Le voyage n'avait pas été simple. Les mouvements aériens étaient trop surveillés pour que l'on osât faire débarquer l'ancien commandant en chef pendant le jour, sur l'une des bases où sa silhouette était familière. Il avait été convenu qu'une manœuvre nocturne aurait lieu au-dessus de la base de Blida. Les avions procéderaient à un lâcher de parachutistes et tourneraient un moment dans le ciel. Ainsi, au moment de l'atterrissage, serait-il possible d'intercaler l'appareil arrivant de France, avec le général Challe à son bord, entre ceux qui rejoindraient leur base, la manœuvre finie. A l'heure prévue, les lourdes machines volantes prirent l'air, l'une après l'autre, emportant les groupes de parachutistes pour une fois figurants inconscients d'une action. La nuit était belle; énorme masse fourmillante d'étoiles qui palpitaient au rythme d'une vie secrète. L ' Atlas barrait d'une falaise plus dense l'horizon du sud. Les initiés guettaient le ciel où passaient les grandes ombres des avions arrachés à la terre par des vacarmes d'enfer. La radio qui devait annoncer l'arrivée de l'avion portant le général Challe se taisait et ce silence insolite paraissait creuser un trou énorme dans le malstrom sonore qui broyait la nuit. Peu d'entreprises de ce genre ne butent pas sur le détail inattendu qui complique tout. Cette nuit là, le détail c'était le retard du général Challe. Les avions larguèrent les commandos de parachutistes sur les zones prévues et revinrent tourner autour de la base, pour prendre leur tour d'atterrissage. Il tombait du ciel des averses de vacarme et parfois l'on apercevait une ombre d'avion fauchant les champs d'étoiles. Les pilotes appelaient. Ils s'étonnaient de ce que ne leur eût pas encore été donnée la permission d'atterrir. On éluda les appels trop pressants, mais les secondes parurent couler plus lentement dans l'orage sonore qui ravageait le ciel. Des pilotes las de tourner dans la nuit s'impatientaient. Les postes récepteurs crachaient des injures à l'adresse des services toujours accusés d'incapacité par les combattants. Il fallait attendre cet avion qui se taisait; ce bruissement d'élytres qu'il s'agissait d'effacer dans une avalanche de bruits. Les appareils tournaient toujours, coulant dans le ciel un toit métallique d'où tombait les appels des pilotes comme des voix de charpentiers excédés. Tous les plans minutieusement établis depuis des semaines, les rendez-vous de traqués, les secrètes retrouvailles, les conciliabules tenus dans des gares, dans des villas de banlieue, à Paris, ou les bureaux de l'Ecole militaire ou des Invalides, risquaient de s'effondrer, ramenés à néant par l'absence de cet avion que semblaient avoir broyé les meules invisibles qui tournaient dans le ciel. Enfin, la petite voix tant attendue tomba des étoiles et l'appareil atterrit au cœur de la grande fête du bruit, la magie des balises et les phares des avions traînant derrière leur attelage de lumière de grosses bêtes grondantes de colère. Une ultime anicroche avait failli tourner au désastre. L'avion portant le général Challe avait atterri normalement ; mais au lieu de rouler vers le point de la piste où était fixé le rendez-vous, le pilote, trompé par les lumières qui dansaient partout, s'était dirigé vers l'unité de protection de la base: la gueule du loup. Alerté à temps, il avait remis ses moteurs en route pour aller se ranger au bord des fossés. Maintenant, Challe jetait à ceux qui l'accueillaient qu'il allait leur falloir apprendre à obéir! Brune est un littéraire, en fait la date avait été décalée d'un jour à la suite d'une erreur dans les dates d'arrivée de Challe. (raconte Jouhaud).
21 Avril 1961 : Le 22, à zéro heure, Alger est occupé, en particulier la radio, le gouvernement général, et surtout la caserne des Tagarins où résident les gardes mobiles du colonel Debrosse, l'homme des barricades. Le général Gambiez, patron militaire, averti, s'est porté seul au devant du R.E.P., il est arrêté par le lieutenant Durand Ruel, qui lui prend son arme et le met aux arrêts. De mon temps, jeune homme, lui dit Gambiez, les lieutenants n'arrêtaient pas les généraux. De votre temps, répond Durand Ruel du tac au tac, les généraux ne bradaient pas l'empire. Un grand nombre d'unités se rallient, en particulier le commando harki d'Edgar Quinet, qui ensuite, sera abandonné, assassinés dans les pires tortures avec femmes et enfants, et, cerise sur le gâteau, quand le F.L.N. fera semblant de découvrir le charnier de plus de mille corps à Kerala, où ils reposent, la grosse presse socialo-communiste les mettra sur le dos de l'armée française. Egalement le Groupement de Commandos Parachutistes du commandant Robin, pied noir, qui sera le fer de lance de l'opération. Au corps d'armée d'Alger, le général Vezinet est un gaulliste inconditionnel, il essaye de sortir son revolver, les mutins le ceinturent, au cours de la bousculade le grand portrait du général de Gaulle qui est au dessus de son bureau lui tombe sur la tête et l'encadre à son tour, les mutins en rient encore. bref. Jean brune (interdit aux chiens et aux français, éditions Atlantis) raconte : Cependant quelque chose avait filtré du projet en cours. Il n'est pas de secret que puissent garder tant d'hommes en marche vers leur mystérieux rendez-vous et les palabres menées par Argoud et Broizat pour bâtir l'affaire, avaient éveillé quelques échos. De confuses alertes chuchotées de bouche à oreille avaient couru d'un bout à l'autre de l'Algérie, comme ces rumeurs sourdes roulées sur des horizons déjà brouillés et qui annoncent les orages d'été. Affolés par l'imminence d'un événement qu'ils pressentaient et dont ils savaient qu'il les acculerait à un choix difficile entre les commandements contradictoires de l'intérêt et de la conscience, les fonctionnaires en uniforme s'étaient rués dans l'une de ces échappatoires qui révèlent à la fois les failles secrètes du caractère des hommes et la maladie cachée dont souffre un ordre mourant. Ils s'étaient fait mettre en permission pour éluder le choix. Partout, dans les "djebels" ou sur les plateaux, les ébullitions minérales des Aurès, de l'ouarsenis ou des monts kabyles, sur les plaines pierreuses du Hodna ou du Chergui, ou les corniches tourmentées du Dahra et les forêts de l'Akfadou ou de l'Edough, des chefs étaient partis pour n'être pas en Afrique quand se lèveraient les aurores difficiles. Les historiens qui, plus tard, voudront écrire l'histoire du 22 Avril 1961 devront d'abord établir une liste des colonels et des généraux permissionnaires. Ils découvriront alors que le "putsch" d'avril 1961, c'est l'épreuve de force entre une élite qui s'engage, qui jette tout dans l'aventure jusqu'aux soldes, jusqu'au prestige hérité du passé, jusqu'à la vie; et un troupeau qui élude l'engagement et l'abandonne aux sergents, parce qu'il a depuis longtemps choisi entre l'auge et le sacrifice à une idée. A Alger, le haut commandement avait multiplié partout les patrouilles de gendarmes et renforcé nuit après nuit les systèmes de barrages. Qui commandera ? Sergent avait répondu: "Les colonels, naturellement!" Alors, Argoud avait bondi: "Pas question! Challe sera le patron. Nous avons obtenu son accord à cette condition. Si elle n'est pas remplie, Broizat et moi, nous n'en sommes pas!" On avait voulu faire un coup de force respectant scrupuleusement l'échelle des hiérarchies. Il est certain que, quelque part, à un moment donné, quelqu'un avait dû dire: "Dans l'ordre!" L'ordre est l'obsession des corps sclérosés. Et cependant, une entreprise qui commençait par l'arrestation d'un général par un lieutenant était nécessairement un défi à l'ordre Si les lieutenants et une grande partie des commandants et des colonels se rallient d'enthousiasme il n'en est pas de même des généraux, même de ceux qui avaient donné leur accord tels Gouraud à Constantine, Ailleret à Bône, Brothier à Bel Abbés. voir ICI une carte des unités ralliées. Les activistes pieds noirs et les autres se mettent aux ordres mais Challe n'en veut pas et les renvoie à leurs affaires courantes. Ce même jour, alors que Challe rappelle par téléphone leur promesse aux uns et aux autres, les partisans en métropole sont tous arrêtés d'un coup d'un seul, le gouvernement était parfaitement renseigné. Les espagnols (ceux qui s'étaient réfugiés en Espagne) tenus à l'écart de la préparation du coup, débarquent le 23, Salan et Susini en tête. Challe les intègre à son équipe, du moins officiellement. Jouhaud raconte que le coup a été très bien accueilli en première réaction ("au palais d'été les gendarmes ont rendu les honneurs aux paras après avoir sablé le champagne avec eux , un escadron de gardes mobiles envoyés en renfort se met spontanément aux ordres de Saint Marc") Gambiez qui témoigne au procès de Challe et Zeller raconte que sorti dans la rue, ayant organisé un barrage de C.R.S., ces derniers avaient enlevés leurs chargeurs, et ont refusé d'ouvrir le feu à ses ordres. |
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| Sujet: Re: histoire du PUTSCH Mer Avr 23 2008, 14:10 | |
| 22 avril 61 : Outre Gambiez, général commandant en chef, Morin, délégué général du gouvernement, Bergier, préfet d'Alger, les putschistes ont envoyés dans le sud algérien Buron, ministres des travaux publics, qui se trouvait par hasard à Alger. Buron s'en vengera en bradant avec allégresse l'algérie lors des "déclarations d'intention" d'évian. jean brune (interdit aux chines et aux français, éditions atlantis) raconte : Maintenant, Challe, assis dans son ancien fauteuil, téléphonait. Mais, comme le notera un témoin lucide, les mêmes réseaux téléphoniques qui tissaient le pouvoir de Challe, le défaisaient. Et jusqu'au bout, les "rebelles" et les "loyalistes" se servirent des mêmes lignes. Le général Gouraud qui commandait à Constantine, avait depuis longtemps promis son accord. Il hésitait. On lui dépêcha le général Zeller et Gouraud se rallia. L'événement a un sens. Quand on réfléchit à ce qui s'est passé à Alger dans la nuit du 21 au 22 avril, on s'aperçoit que l'audace de quatre ou cinq officiers a suffi à venir à bout de l'énorme appareil de "l'ordre". Sergent donne l'ordre aux camions de pousser les Jeeps des gendarmes et pénètre seul au coeur du corps d'armée, une enveloppe bourrée de papiers blancs à la main. Mosconi, la jambe plâtrée, s'en va frapper du bout de sa canne à la porte du Fort-l'Empereur. Et au Fort-l'Empereur comme à la caserne Pélissier, les grands chefs s'enferment derrière les grilles. On n'en trouve aucun en tête des escadrons de gardes, face aux convois de parachutistes, là où leur présence eût sans doute modifié l'événement. Il faut qu'il y ait une raison à cette dérobade, à cette véritable démission du haut commandement qui ne sait même pas organiser la défense du corps d'armée en avant des grilles du corps de garde. On entend cette raison, quand un sous-lieutenant pousse le général Vésinet dans une 403 pour le convoyer jusqu'à l'avion qui l'éloignera momentanément d'Alger. - Croyez-vous, demande le général, que je serai autorisé à garder mon appartement de fonction ? Partout où les chefs et les troupes ont été à l'abri de la canne symbolique du capitaine Mosconi, ils ont hésité, tergiversé pour attendre que le sort décide, et finalement rallié le vainqueur. A Alger, les secrétaires du corps d'armée se taisent. A Sétif, citadelle des fonctionnaires, ils vont jusqu'à huer - depuis le premier étage - des légionnaires venus faire le plein d'essence d'un véhicule. Sur les murs, ils avaient écrit: "La quille... Mort aux vaches... Vive de Gaulle!" - Nous fûmes d'abord attentistes, puis rebelles, puis "loyalistes"... Mais chaque fois avec un temps de retard, dit J .-P. Angelleli, bon observateur de son régiment perdu dans les "djebel" du Constantinois. C'est si vrai que le 117ème régiment d'infanterie, commandé par le colonel Froment, refusant de se rallier à Challe, le colonel Godard s'en plaignit au commandant Vailly. - Une seule solution, dit Vailly; il n'y a qu'à faire prisonnier le 117 d'infanterie. - Le commandant Vailly se rendit aux cantonnements du régiment. Il délégua un sous-lieutenant en parlementaire. Celui-ci se fit ouvrir les grilles, laissa sa Jeep en travers de la porte pour en interdire la fermeture et fit purement et simplement prisonnier le poste de garde. Et le régiment qui menaçait si fort de se battre se rendit au commandant. - Je vous souhaite de réussir, dit le colonel Froment à Vailly. J'entends le commandant quelque part à Lisbonne. - Au procès qui s'ouvrit plus tard, on a dit que cette action risquait d'entraîner la mort de plus de cent soldats. Vailly éclate de rire : - Mais ils ne sont pas morts ! Un autre témoin m'a dit : - Nous avons donné un coup de poing dans un oreiller... Et ceci explique beaucoup de choses. L'appartement de fonction du général Vésinet était aussi un symbole. Aux préoccupations qui émergent pendant les heures graves, on mesure l'état de décomposition d'un ordre. Le général Vésinet devait retrouver son appartement de fonction et être élevé, moins d'un an après, à l'apparente dignité de général d'armée. Apparente, parce qu'il n'y avait plus d'armée. Elle s'était défaite en quatre jours, effondrée en poussière comme ces bâtisses aux façades orgueilleuses, mais partout rongées dans leurs oeuvres vives et qui s'écroulent au premier souffle d'orage. " fin de la citation de Brune ; Ce samedi soir, les généraux considèrent que l'armée de terre est ralliée en totalité, l'aviation en partie, la marine pas du tout. Les régiments de paras ont été conduits dans Alger par les groupes d'étudiants de Susini, l'armée leur délivre généreusement armement et munitions (y compris un ou deux fusils mitrailleurs) ce sera la base des commandos Z de Leroy.
23 Avril 1.961 : A Paris c'est l'affolement, le gouvernement arrête tous ceux qui ont des opinions Algérie française, Debré fait distribuer des godillots et des armes (qui ne seront jamais rendues) à ceux qui voudront bien se jeter en travers des pistes d'atterrissage pour empêcher les parachutistes d'atterrir. .Voici l'analyse de Soustelle : (L'espérance trahie, éditions de l'alma, 1962). " Cette fascisation s'est donné libre cours depuis la tentative de "putsch menée par le général Challe, avec les généraux Zeller, Jouhaud et Salan, du 22 au 25 avril. Des faits eux-mêmes, je ne connais guère que ce que tout le monde a pu lire dans la presse. " Tout en ayant beaucoup d'estime pour le général Challe, je ne l'avais guère vu plus de quatre ou cinq fois. Quoi qu'on ait prétendu, j'ai la conviction qu'il n'avait aucunement pour but de passer en métropole pour y prendre le pouvoir; il voulait donner un coup d'arrêt à la politique d'abandon en Algérie, sauver cette province, l'apporter à la France. Quand il vit qu'une partie des cadres de l'Armée se réservait et que les cellules communistes du contingent, enhardies par le soutien officiel, dressaient certains soldats contre leurs chefs, il préféra se sacrifier pour éviter une effusion de sang et prit sur lui toutes les conséquences de son geste. " Avec lui, le général Zeller, ancien chef d'état-major général, le commandant de Saint Marc, rescapé des camps de la mort d'Hitler, et de nombreux officiers généraux et supérieurs furent condamnés à de lourdes peines de prison, au moment même où Ben Bella, Ait Ahmed et autres criminels, coupables ou instigateurs de forfaits atroces, étaient confortablement installés dans des châteaux. " Les premières nouvelles d'Alger, le 22 avril, provoquèrent à Paris dans les milieux gouvernementaux et dans les milieux défaitistes (qui se trouvaient, par la force des choses, de plus en plus associés) une véritable panique. C'est ainsi seulement que peuvent s'expliquer les scènes grotesques qui se déroulèrent place Beauvau, au ministère de l'intérieur et au Grand-Palais, où des volontaires vinrent offrir leurs bras héroïques pour "défendre la République" que personne ne menaçait. Un bon tiers de ces candidats miliciens était fourni par le parti communiste, qui vociférait: "Des armes! Des armes!", heureux d'obtenir quelques moyens d'un gouvernement bourgeois assez sot pour les lui donner. Un autre tiers se composait de vaillants francs-tireurs de salles de rédaction provenant des journaux et hebdomadaires progressistes. L'U. N. R. inconditionnelle apportait le reste. "On vit des députés brandir des revolvers, des journalistes pro-fellagha chausser des godillots et se coiffer de chapeaux de brousse, accessoire évidemment indispensable pour soutenir le choc des parachutistes dans les rues de Paris. " En même temps, Michel Debré, perdant tout contrôle de lui-même ainsi que le sens du ridicule, invitait les Parisiens à se porter "à pied et en voiture" au-devant des envahisseurs hypothétiques pour les dissuader de leur sacrilège entreprise. " La suite, et notamment le procès intenté au général Challe, a surabondamment prouvé qu'il n'avait jamais été question de lancer les "paras" sur la métropole. Mais cette intoxication permit au général de Gaulle de faire application de l'article 16 de la Constitution. " Ainsi que je l'ai dit, cet article avait été longuement discuté en 1958, et ses conditions d'application étaient très précisément limitées. Ces conditions étaient-elles réunies au lendemain du "coup" de Challe? On peut en douter. Si grave qu'elle fût pour l'ordre public au sens classique du mot, sa tentative ne portait pas atteinte à l'intégrité du territoire national, au contraire, puisqu'elle visait à la maintenir On peut difficilement prétendre que le fonctionnement des pouvoirs publics fût empêché. Enfin, il n'existait aucune des circonstances qu'entraîne une invasion ou une guerre atomique, hypothèses mises en avant pour justifier l'article 16. Mais admettons même que le Président de la République ait eu le droit pour lui en appliquant l'article 16 pendant le "putsch". Dès le 25 avril à minuit, dès lors que Challe s'était constitué prisonnier et que le mouvement d'Alger avait pris fin, il n'existait plus aucune justification au maintien de l'article 16. Tout ce qui a été fait et tout ce qui se fait encore par référence à cet article est de toute évidence anticonstitutionnel et illégal. Il n'entre pas dans l'objet de cet ouvrage de relater ce qui s'est passé après avril 1961, sinon dans les grandes lignes et pour en tirer des conclusions générales. Je me bornerai à rappeler ce qui a été l'action du pouvoir sous le régime de l'article 16, dont, par un artifice encore plus anticonstitutionnel que tout le reste, les conséquences subsistent alors même qu'on a officiellement rétabli l'état normal des choses : - répression collective d'une ampleur et d'une durée sans précédent contre la population européenne, notamment à Alger. Perquisitions, arrestations, brimades, brutalités de toute nature ont été infligées systématiquement à ces infortunés, traités comme les habitants d'un pays occupé par une armée ennemie; - délation organisée dans l'Armée, où il a suffi, pendant de longs mois, qu'une cellule communiste dénonce des officiers ou des gradés comme "activistes" pour qu'ils soient mutés, sanctionnés, souvent destitués et chassés; -"chasse aux sorcières ", en Algérie et en métropole, s'accompagnant d'illégalités, de sévices et d'atteintes aux libertés démocratiques et à la dignité humaine. Des femmes, comme Mme Salasc et Mlle Lucchetti, ont été torturées. Des enfants même ont été incarcérés dans des conditions révoltantes." fin de l'extrait de Soustelle. A Oran la foule entre en délire, on retrouve les scènes de fraternisation du 13 Mai, la ville est entièrement pavoisée. Les espagnols (Salan, Susini, Ortiz,)débarquent à Alger Jouhaud, qui a déjà fait l'exercice en 58, recommence la mise au point d'un éventuel débarquement de paras en métropole, il a les mêmes problèmes et les mêmes limites qu'à l'époque, flotte aérienne hétérogène et capacité limitée à trois régiments. En Oranie, la situation est très confuse, l'émissaire de Challe, le général Gardy atterrit à Sidi- bel- Abbés et rencontre le général Pouilly qui commande l'oranie, Joxe le ministre de l'algérie et Olié, chef d'état major, atterrissent à Mers-el-Kébir. Pouilly laisse son bureau et son état major à Gardy et part sur Tlemcen organiser une riposte. Les responsables de zone d'oranie ont le téléphone chaud, écoutant les arguments, soit de Gardy soit de Pouilly. Deux régiments de paras envoyés par Alger arrivent à Oran. Le soir de Gaulle intervient à la télé. Il stigmatise le quarteron de généraux à la retraite, il supplie "françaises, français, aidez moi" il demande à tous de s'opposer "par tous les moyens". Une fois de plus, celui qui ne craint pas de faire couler le sang français, c'est de Gaulle. Cette allocution qu'on a pu entendre par radio en Algérie fait grosse impression. |
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| Sujet: Re: histoire du PUTSCH Mer Avr 23 2008, 14:11 | |
| 24 Avril 1961 :
Mollet pour les socialistes, Schuman pour les chrétiens, Bergerac apportent leur soutien à de Gaulle, contre les "factieux." Son téléphone surveillé depuis des mois, son appartement surveillé ostensiblement par la police, averti qu'il ne va pas tarder à être arrêté, Soustelle s'échappe dans la voiture d'une voisine, camouflée sous une couverture à l'arrière, et gagne la Suisse. Sauf une brève interview en 62, Soustelle ne retrouvera la France qu'en 68. Pendant son exil, il communiquera avec son épouse en lui écrivant en nahuatl, la langue aztéque, que tous deux pratiquent parfaitement. Pour revenir sur les motivations du mouvement du 22 Avril 1.961, et particulièrement celles de Challe, voici l'opinion de l'excellente revue "Veritas" qui se consacre à l'histoire de cette période: Il y a 40 ans, le 21 avril 1961, le Général Challe, ancien Commandant en Chef des forces françaises en Algérie (de novembre 1958 à avril 1960) prenait la tête d'un mouvement insurrectionnel à Alger avec les Généraux Salan, Zeller, Gardy et Jouhaud. Le caractère tragique de la destinée du Général Challe, homme de haute valeur morale, combattant authentique de la résistance, arrivé aux plus hauts grades par son seul mérite et qui fera preuve d'une abnégation totale dans l'épreuve, le fera jouer de malheur en se trouvant continuellement en porte-à-faux avec tous les acteurs de la tragédie algérienne. Dans son livre" NOTRE REVOLTE" écrit, en grande partie, en prison, Maurice Challe décrit une scène qui se passe au moment des Barricades d'Alger en janvier 1960. L'organisation mise sur pied par Joseph Ortiz, soutenue par les unités territoriales du Colonel Sapin-Lignières, s'est retranchée, en pleine ville, après l'échauffourée violente et meurtrière, manigancée par les gaullistes, qui les a opposés aux gendarmes et aux C.R.S. du Colonel Debrosse. Devenu très populaire par ses manières simples et franches et surtout par le grand succès de sa stratégie - plan Challe - qui, en 1959, a pratiquement vaincu toute la rébellion sur le terrain, le Général refuse, de réduire les barricades par la force. Parfaitement en accord avec le Gouvernement, sa position est claire: Il combat pour une algérie française. Cependant, il est un peu troublé par le discours d'autodétermination du 16 septembre précédent et par le renvoi brusque de Massu "congédié comme un trompette", dit-il, par De Gaulle. Alors le Général Challe raconte son entrevue avec le Général Ely, Chef de l'état-major des Armées, envoyé par De Gaulle: "Le Général De Gaulle est notre seule chance - affirme Ely- sa retraite entraînerait la perte de l'Algérie. Celle-ci doit rester française! " Challe se remémore aussi le message écrit de Michel Debré: "La politique de la France a été clairement définie. Elle seule peut assurer le maintien de l'autorité française en Algérie". Tout cela concorde avec ce qu'assurait quelque temps avant cette explosion de colère, Paul Delouvrier, Ministre résidant, à Mostaganem, le 30 décembre 1959 : "Je viens de rappeler que nous combattons pour la France, l'Occident et la liberté, cela veut dire que nous combattons pour une Algérie française. (Montagnon - La France Coloniale - Pygmalion 1990- page 399.) Le 29 janvier 1960, de surcroît, De Gaulle prend la parole. Va-t-il encore s'exprimer en "charades et rébus", ce qui intrigue les uns et affole les autres. Non, pour une fois, le langage est clair: "Français d'Algérie, comment pouvez-vous écouter les menteurs qui vous disent que De Gaulle et la France, en donnant le libre choix aux Algériens, veulent vous abandonner, se retirer d'Algérie et la livrer à la rébellion ?" . Et s'adressant à l'Armée: "Vous avez à liquider la force rebelle qui veut chasser la France d'Algérie et faire régner sur ce pays sa dictature de misère et de stérilité." (Discours et Messages de Charles De Gaulle Plon 1970- page 164 et J.O. du 30.01.1960) Tout est dit et tout est clair ! En somme, de Gaulle s'indignait que les Français d'Algérie puissent le suspecter de faire ce que justement il s'apprêtait à faire et qu'il fera exactement jusqu'au bout. Aujourd'hui, nous pouvons apprécier à sa juste valeur la duplicité de Charles De Gaulle et de ses sbires qui mentaient aussi effrontément, sur ordre, car à cette date le Chef de l'état avait déjà décidé de rejeter l'Algérie vers ses antiques malédictions (c'est lui-même qui l'avoue dans ses "Mémoires d'espoir"). Ce fut là une des plus belles journées de dupe ! La fourberie qui y fut déployée, le mépris des hommes qui y fut manifesté et les drames qui s'ensuivirent offrent peu d'exemples aussi indignes et aussi révoltants dans toute l'Histoire de France. Et voilà l'honnête, le fidèle Général Challe, cet homme droit, intègre et loyal, tiraillé entre sa fidélité à Charles De Gaulle qui ne s'est jamais démentie dans le passé et son angoisse devant le pire qu'il appréhende et qu'il pressent vaguement, trop vaguement encore. .. Hélas! Joseph Ortiz, Michel Sapin-Lignières, Pierre Lagaillarde et leurs compagnons des Barricades l'ont, eux, parfaitement compris. Ils savent que De Gaulle va se parjurer et aller jusqu'au crime en abandonnant les quinze départements français d'Algérie et leurs populations innocentes aux mains des terroristes du F.L.N. Ils ont beau l'expliquer, le clamer et accepter spontanément de mourir pour en faire la preuve, ils ne peuvent convaincre Challe qui refuse de croire une telle ignominie. Le vrai drame s'est joué à cause de l'incrédulité pendant ces journées- là ! Sceptique, Maurice Challe choisit de basculer du côté de la discipline et fit démanteler les Barricades - certes, sans effusion de sang - laissant arrêter ses principaux organisateurs, dissoudre les Unités Territoriales, muter, bientôt, les meilleurs officiers. "Non, De Gaulle ne peut mentir à ce point!" Challe relate dans "Notre révolte" son impression d'alors. Il ne peut pas croire, il ne peut même pas concevoir une telle forfaiture! Quinze mois plus tard, le malheureux devait détruire de ses mains toutes les chances qui lui seraient restées de réussir lors du mouvement insurrectionnel des Généraux, le 21 avri1 1961. Voyant qu'une grande partie de l'Armée ne suivait pas, il choisit de se rendre, tout en étant persuadé qu'il serait condamné à mort et fusillé. L'échec lamentable de ce putsch dans lequel de prestigieux officiers avaient englouti, volontairement, leur vie, leur carrière, leurs biens, leurs familles pour ne conserver que l'honneur et le respect de la parole donnée, André Rossfelder l'a parfaitement résumé: "Avec l'Armée, nous, civils algérois, étions des patriotes en mai 1958. Sans elle, aux Barricades, nous devenions des factieux, mais sans les civils, la révolte de Challe n 'était plus qu'une junte". Sur l'attitude décevante de la majorité des cadres, Hélie de Saint Marc, qui fut le premier bras séculier de la révolte, exprime, dans son dernier livre, "Les Sentinelles du Soir" (Prix VERITAS 2000) un jugement sévère: "L'injustice du monde doit beaucoup à l'incertitude de ces êtres flottants qui agissent comme des bouchons de liège au gré des Courants : je me souviens, la nausée aux lèvres, de ces hommes qui auraient été pour si la révolte militaire avait atteint son but et qui furent si farouchement contre parce qu'elle avait échouée." Quelles qu'aient pu être les erreurs de Challe dans cette malheureuse aventure, il avait choisi les voies de l'honneur avant de capituler par crainte de voir couler le sang français. VERITAS rend hommage à son désintéressement, à la noblesse de son attitude qui lui fit rejeter, tout comme le Général Zeller, le sordide marchandage suggéré en sous-main par l'ignoble Edmond Michelet: Aveu de culpabilité contre clémence ! Toute la noblesse du Général Maurice Challe s'exprima dans cette déclaration qu'il fit devant le Tribunal: "Il n 'y a pas de loi au monde qui puisse obliger un homme à faire du parjure son pain quotidien !" Face à de tels hommes, que pèsent des Joxe, des Messmer, des Morin ou des Delouvrier, au gaullisme alimentaire, fidèles à la main nourricière plutôt qu'à la parole donnée et qui firent tous preuve de "cette médiocrité qui ne s'imite pas" ? Rappelons les paroles du général de Pouilly au procès : "Obéissant, j'ai choisi, avec la nation française la honte d'un abandon, et pour ceux qui, n'ayant pu supporter cette honte, se sont révoltés contre elle, l'histoire dira sans doute que leur crime est moins grand que le nôtre". On voit que VERITAS met sur le compte du remords la prise de responsabilité de Challe à la place de Massu, défaillant. C'est une explication convaincante. Ce fût, tout au long de cette période un phénomène extraordinaire de voir les gens se détacher du général de Gaulle au fur et à mesure que la réalité de ses intentions se précisait et être ainsi réduits par petits paquets. Qu'il reste encore du monde pour admirer ces mensonges permanents aboutissant au génocide des partisans de la france et d'autres partis que le F.L.N., à la main mise d'une minuscule oligarchie sur un grand pays, aux massacres subséquents, reste un sujet d'étonnement. Que les complices de ces ignominies tentent désespérément de se justifier en ajoutant mensonges et palinodies ignobles à celles du général est bien plus compréhensible. Le soir, la foule d'Alger en délire qui attend depuis le matin une intervention des généraux écoute avec émotion Challe lui dire "nous sommes venus pour vaincre ou mourir avec vous", délire. La situation est de plus en plus confuse en algérie, les généraux changent d'opinion plusieurs fois par jour, certains perdent leur contrôle. A La Calle le 14ème bataillon de chasseur alpin arrête ses officiers. Ordonnance du gouvernement, destinée à lutter contre l'O.A.S., prise avec l'accord de toutes les grandes consciences. Elle étend le champs d'application des internements administratifs, et porte de 5 à 15 le nombre de jours de garde à vue.
25 Avril 1961 : La situation en Algérie est de plus en plus confuse, Lecomte à la tête de son régiment de para fait route vers Mers-el-Kébir pour en prendre le contrôle, arrivé en vue du poste de garde il reçoit de Gardy l'ordre de ne pas donner suite. Le général Bigot, rallié au putsch, ne contrôle plus son armée de l'air, des avions décollent et rallient la métropole, un comité de soldat a pris le contrôle de la base de la Mitidja. Le deuxième REP doit aller reprendre le contrôle de l'aérodrome de Maison Blanche, ce qu'il fait sans un coup de feu. A seize heures, Challe réunit ses troupes et discute deux options, le repli sur Alger transformé en réduit, ou la reddition. Nombreux sont les absents dans cette réunion, Jouhaud "introuvable", (car on ne l'a pas vraiment cherché), Gardy et Argoud en Oranie, Lecomte, Masselot sur la route avec leurs régiments. La reddition est choisie, Sergent sort son revolver, Salan l'empêche de tuer Challe. Susini arrive à se frayer un chemin jusqu'à Challe il lui propose un plan basé cette fois sur les civils (mobilisation de huit classes). Challe donne son accord, Jouhaud fait une déclaration dans ce sens à la télé, mais des officiers qui ont rencontré les éléments civils présentés par Susini rendent compte à Challe que les armements et la formation de ces civils est tout à fait insuffisant, Challe (qui le pensait) élimine toute autre solution que se rendre. La radio gaulliste diffuse la fausse nouvelle du suicide de Salan. Susini et Jouhaud n'arrivent pas à prendre contact avec les deux régiments de paras, Argoud, et Gardy qui rentrent d'Oran, ils sont arrivés aux environs d'Orleansville, Jouhaud et Susini souhaitaient les avoir à Alger pour en faire un réduit. La débâcle du putsch, vue par jean Brune ("interdit aux chiens et aux français", éditions Atlantis). Le 25 au matin, le général Zeller fit appeler Sergent. Il était seul derrière son bureau, le visage un peu rosé. - Sergent, dit-il, le général Challe a décidé de se rendre. "Je me souviens encore, raconte Sergent, de la douleur physique que m'infligea l'information." - Je voulais vous demander, poursuit Zeller, si vous-même et les jeunes officiers accepteriez de poursuivre l'effort... Sergent s'emporte. Il dit que les capitaines ne se sont pas lancés dans l'aventure pour jeter le manche après la cognée, au bout de quatre jours. Mais le destin est déjà en marche. Challe a convoqué les officiers supérieurs pour leur faire part de sa décision. Sergent refuse d'y croire. Il contourne le bureau et frappe à la porte du chef d'état-major. Le colonel de Boissieu a été rappelé par Challe du Constantinois. Il demande : - Qu'y a-t-il ? - Je viens d'apprendre la décision du général Challe, dit Sergent. C'est atroce... - Oui, dit le colonel, c'est atroce. Mais nous n'y pouvons rien. - Nous pouvons peut-être tirer sur le général Challe ? Boissieu a les yeux embués de larmes. Il murmure : - Oui... Peut-être... Zeller entre. Et de sa petite voix posée, calme, qui porte un étrange pouvoir de persuasion, il dit : - Voyons, Sergent, vous ne pouvez pas tirer sur le général Challe. Le soir tombait sur Alger, engloutissant lentement la ville avec son grand arroi de terrasses et de jardins, les chevelures raidies des palmiers découpées sur le ciel rouge, le dessin idéal de la baie, la mer déjà rendue à l'opacité de l'étain et les montagnes qui n'irradiaient plus les lueurs de gemmes allumées par le couchant. On pensait aux derniers mots de Rommel : "La nuit se fait autour de nous..." La foule s'était assemblée sur le Forum. Ce n'étaient plus les grandes houles sonores des fêtes de mai 1958. C'était une station silencieuse, une veillée. Le chœur si souvent délirant d'acclamations, de clameurs et de chansons s'était tu, écrasé par l'intensité tragique des heures. On avait réclamé les généraux au balcon. Mais les appareils amplificateurs ne fonctionnaient pas. Les acteurs qui avaient manqué leur rôle et allaient s'enfoncer dans leurs caves et leurs geôles promenaient leur regard sur la foule qui les regardait, devinant les lendemains terribles qui l'attendaient. Et cette contemplation mutuelle dans le silence, interdisant toute explication, était comme un symbole des confusions qui avaient empoisonné les jours écoulés. Les gendarmes avaient pris position sur les avenues qui dominent le Forum. |
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| Sujet: Re: histoire du PUTSCH Jeu Avr 24 2008, 09:12 | |
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| Sujet: Re: histoire du PUTSCH Dim Aoû 31 2008, 23:48 | |
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| | | Aokas Admin
Nombre de messages : 4031 Age : 83 Date d'inscription : 23/06/2007
| Sujet: Re: histoire du PUTSCH Lun Sep 01 2008, 07:54 | |
| OUI, un grand moment de notre histoire contemporaine...dommage qu'on parle pas plus du 14 ! où j'ai été incorporé en 1960.........!! https://paras.forumsactifs.net/les-regiments-dissous-f37/14eme-rcp-t209.htmce fût un curieux moment, quand Lecomte m'a envoyé au DIM à Alger *, (équivalent Ste Marthe à Marseille) pour me présenter avec ma tenue du 14 à Cherchell pour faire la prochaine promotion d'OR, inutile de parler de la chaleur et de l'enthousiasme de l'accueil ! enfermé immédiatement dans une chambre avec un garde devant la porte ! * afin de m'épargner quelques conséquences.........; pour mes copains, ils ont été désarmés par les gendarmes et crs, mis dans un camp avec le 18 sans arme en attendant d'être volatilisé dans d'autres unités. honte à nos politiques ! ___________________________________ ____________________________________Aokas 14ème RCP - 9ème RCP AFN 194658 | |
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