GAUFFRE Paul L’OUBLIAux bords d’un petit village de la Meuse, que l’effroyable tourmente n’a pas épargné, quelques vestiges de maisons sont encore debout au milieu de ses ruines, rappelant pourtant que jadis, ici, il y avait la vie. En bordure du chemin traversant ce village, une croix, noircie par le soleil et les années, semble ne tenir debout que pour l’apparence, mais attire l’attention des passants et leur demande comme dans une prière de sauvegarder le symbole d’un héros qu’on a oublié.
Cette humble tombe contient les restes d’un soldat qui n’a pas eu une sépulture qu’il méritait. La terre qui recouvre son linceul semble bien froide. L’herbe et des pieds de ronces qui ont repris leur
existence ont fait disparaître peu à peu la trace de cette tombe.
Ce soldat a pourtant donné noblement sa vie pour la France
Que d’ingratitude à son égard, il ne l’a pas méritée, et il semble encore nous dire « Respectez ma dernière demeure et je dormirai en paix ».
Jeune peut-être, père de famille, ce combattant est parti plein de courage le premier jour de la guerre. Il a fait son devoir, de sa vie le sacrifice, le sort l’aura désigné, il l’a accepté en bon Français.
Il est tombé glorieusement pour son pays qu’il aimait tant et maintenant que le sacrifice est consommé, c’est l’oubli.
Que de respect nous devons avoir pour ces héros obscurs et ignorés ! Leur gloire en est plus vive et plus pure, leur souvenir devrait être pour nous un culte sacré.
Peut-être que dans un coin de France, ses vieux parents, sa femme, ses enfants le pleurent ensemble. Ils ont de lui sa photographie, la dernière avant son départ, précieuse relique qu’ils chérissent, car elle leur rappelle les années de bonheur passées ensemble et maintenant plus rien si le souvenir, le foyer qu’il s’était fait, est détruit.
Ces familles éprouvées par le sort ont droit au respect et à la reconnaissance de tous.
Inclinons-nous devant leur douleur.
Anciens combattants redevenus villageois ou citadins, allez fleurir sa tombe au moins une fois l’an, pour vous rapprocher de lui et en méditer son sacrifice, afin que son souvenir soit perpétué et que ce déshérité de la Patrie dorme son dernier sommeil dans un rayonnement de gloire.