[size=40]Taubira : le crépuscule[/size]
Vous le saviez, vous, que Christiane Taubira, la star du tout-Paris bobo, la Walkyrie des nuits parlementaires, la passionaria des cours, la pourfendeuse de Front, la déclameuse de poèmes exotiques, la mordue du mur des cons, la chouchoute des récidivistes, était candidate aux régionales ? Ce n’est pas un gag. Elle était en 11e position sur la liste « Guyane, de toutes nos forces ! », section Cayenne, menée par Line Létard.
Et avoir Christiane Taubira sur sa liste, c’est un cadeau du ciel, un message divin ; c’est comme un morceau de la vraie croix planté à côté de l’urne, on se dit que rien de mal ne peut arriver avec un tel talisman, on flotte en lévitation, extatique, dégoulinant de reconnaissance. « Savoir que Christiane est là, c’est déjà énorme. Cela va rassurer les gens qui étaient un peu déçus de ne pas la voir tête de liste dans la campagne » jubile Line. Et, comme la boursouflure est une marque locale, elle ajoute : « Nous sommes très fiers de sa présence sur notre liste. Elle est dans la logique d’une transmission entre les générations, elle est là pour nous accompagner. »
> > > > > > Une madone ! Carrément sainte Geneviève face aux Huns, ou Jeanne d’Arc boutant les Anglois, ou Charles Martel… euh, passons ! ou Napoléon au Pont d’Arcole, de Gaulle descendant les Champs Élysées. « Ah ! Christiane ! On t’aime ! Accompagne-nous ! Sauve-nous ! »
> > > > > > Et Christiane fit.
> > > > > > On allait voir ce qu’on allait voir !
> > > > > > Et l’on vit.
7,1 % ! Vous avez bien lu ! Il ne manque pas un chiffre avant le 7. La liste du parti Walwari, qu’elle a fondé en 1993 et pour lequel elle s’était engagée, s’est pris la méchante gamelle : 7,1 %, c’est kiki, c’est croupion, c’est rachot, un peu comme si Usaïn Bolt, aux JO, courait le 100 mètres en 18 secondes 2 dixièmes. En 2010, au premier tour des régionales, le parti Machin avait recueilli 23 %. Réchauffement climatique oblige, il y a eu grosse évaporation de votants en cinq ans : 70 % des partisans de Christiane ont fichu le camp. C’est bête, quand même, quand on veut assurer une transmission entre générations. Rien à transmettre, à personne : ça fait désordre. La marque « Taubira » ne fait plus rêver. Le frère présentait également une liste, fièrement baptisée « La Guyane en perspective » : il a fait 0,97 %. Beau tir groupé familial.
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Qu’est-elle allée faire dans cette galère ? La prétentieuse croit-elle qu’il lui suffit de paraître pour que les électeurs s’inclinent bien bas sur son passage. Cette bouffissure de l’ego, insupportable en temps ordinaire, devient insignifiante après les résultats de dimanche : les Guyanais, « ses » Guyanais, l’ont envoyée balader comme aucun métropolitain n’aurait osé le faire sans encourir les foudres de la dame. Bravo à eux.
Le plus surprenant, dans cette histoire, c’est quand même le silence absolu des médias sur ce gros bide taubiresque. Après tout, ils ont peut-être sagement agi : elle les aurait collés devant la XVIIe chambre pour racisme avec sarcasmes, circonstance aggravante.
Yannik Chauvin