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 Algérie ! Et si on parlait torture !!

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MessageSujet: Algérie ! Et si on parlait torture !!   Algérie ! Et si on parlait torture !! Icon_minitimeMer Oct 28 2015, 08:49

13 Novembre 1.957:

Robert Lacoste, gouverneur général socialiste du gouvernement Mollet, pour punir les étudiants algérois de leur manifestation du 11novembre, au cours de laquelle ils réclamaient des actions plus rudes vis à vis des rebelles, supprime le sursis de leurs dirigeants.


 Il met également en résidence surveillée un membre particulièrement remuant du comité d'entente des anciens combattants, et expulse d'algérie des dirigeants du mouvement des universitaires.

Je précise que Brétirouge était sur les lieux avec le colonel Trinquier qui fut le remplaçant du colonel Bigeard .

Je suis resté avec lui d'Avril à juillet 1958..
 
14 Novembre 1.957:

Les gouvernements anglais et américains, dans un communiqué commun annoncent l'envoi "symbolique" d'armes en Tunisie, explicitement destinés aux tueurs du F.L.N. Le gouvernement français proteste.

 La victoire d'Alger. Succès de guerre psychologiques .

La guerre psychologique dans la Bataille d'Alger : La torture, parlons-en:

Moralement le sujet n'est pas sans importance et il a mis à l'épreuve des officiers qui n'avaient pas choisi de faire carrière dans l'interrogatoire...

 Les amis de Vidal-Naquet ne pourraient pas le croire, enfermés dans leur certitude d'un renseignement qui ne se pourrait que par la torture physique.
De là à la conviction que tout officier d'Algérie est un tortionnaire il y a un pas allègrement franchi, par des hommes intellectuellement malhonnêtes.

Sans doute y a-t-il nécessairement une différence essentielle de comportement entre acteurs et batteurs de coulpe.

Le corps des officiers manifeste une diversité d'attitudes qui, sans rompre l'esprit de corps, exprime une liberté d'esprit sans laquelle il n'y a pas de conscience morale.

 On n'ignore peut-être pas l'hostilité à la torture du Colonel Godard, maître de la deuxième phase de la Bataille d'Alger et exerçant des fonctions analogues à celles d'un préfet de police.

Il est étrange de constater que c'est surtout pendant cette phase, sous son commandement, secondé par les officiers faisant en corps et individuellement l'objet de la diffamation systématique de Vidal-Naquet, que les réseaux de poseurs de bombes ont été démantelés. Fossey-François interdit tout recours à la torture dans son unité, l'un des régiments de la Bataille d'Alger.

 Et il n'est pas le seul officier parachutiste à avoir eu une telle attitude.

Trinquier, répondant à Yacef Saadi qui lui a objecté "J'ai fait déposer mes bombes à la main parce que je ne dispose pas comme vous d'avions pour les transporter", analyse froidement l'enchaînement à ses yeux fatal, en guerre révolutionnaire, du terrorisme et de l'acceptation de sa contrepartie, la torture que le terroriste n'a pas le droit d'exclure s'il veut être reconnu comme combattant:
" Le terroriste est devenu le soldat de la guerre révolutionnaire comme l'artilleur, le fantassin ou l'aviateur de la guerre conventionnelle.

 Le soldat admet la souffrance physique et la mort comme inhérente à son état.

Pour avoir les mêmes droits, le terroriste doit accepter les mêmes risques.
Or il les refuse. C'est un tricheur.

Qui sera interrogé sur son organisation plus que sur ses actions.

S'il donne les renseignements - ce qui est le cas en général - l'interrogatoire sera terminé.

 Sinon, ils lui seront arrachés par les moyens appropriés.

 Comme le soldat, il devra affronter la souffrance et peut-être la mort.
Il doit l'accepter comme la conséquence de l'emploi des armes de guerre qu'il a choisies.

 Les résistants, sous l'occupation, violaient les lois de la guerre [et] savaient les risques auxquels ils s'exposaient;
 leur gloire ...est de les avoir affrontés. "

 Autre comportement, si l'on pense à la déclaration - que cite Vidal-Naquet - du Capitaine Estoup témoignant au procès du Lieutenant Daniel Godot:
de torturer pour casser l'organisation de tueurs, s'il était accepté, rendait pour ceux qui l'avaient reçu, irréversible la mission de sauvegarde de l'Algérie française, mission hors de laquelle ces officiers auraient refusé de se salir ainsi les mains.

 Comportements divers mais qui chacun relève d'une éthique.

En face, si l'on écarte les communistes et leurs alliés conscients, faisant par doctrine et avec préméditation le jeu de l'adversaire, quel est le rôle de la "morale" au nom de laquelle on affirme agir?

L'indignation morale s'est peu manifestée devant les meurtres avec des mutilations atroces pratiqués par le F.L.N. massivement dans le bled; les "bougnoules" ne méritaient-ils pas le même intérêt que les Européens du P.C.A. ou des Musulmans occidentalisés?

 Elle ne s'est guère longuement attendrie lors des tueries d'Alger commises par les réseaux de poseurs de bombes dont les héros trouvaient asile, par exemple chez... Audin.

 Et les gens moraux, sauf très rares cas, se sont peu préoccupés plus tard des tortures infligées à des membres de l'O.A.S. par des barbouzes sans conteste rattachées au pouvoir central :

 l'Elysée. Il faudrait pouvoir extraire des cabales les hommes qui se sont réellement inquiétés de la seule torture, les seuls dont l'opinion, parce que non partisane, mériterait une qualification morale, alors que les moralisateurs spécialisés découvrent leur complicité objective et consciente avec le F.L.N.:

 Vidal-Naquet finit par avouer l'insertion du comité Audin dans la lutte contre la guerre d'Algérie en se plaignant de "L'incomplète" résistance française à la guerre d'Algérie dans laquelle l'activité du comité se trouva insérée.

L'agitation du comité Audin prend ainsi sa place: l'inquiétude "morale" se dévoile arme de guerre civile, maniée par des combattants qui ne prennent que le risque d'un procès en diffamation.

Mais il ne s'agit pas d'un problème d'histoire.

 Car les gesticulations de comités divers découvrent peu.

 On a trouvé Audin, qui a disparu, Alleg que les tortionnaires habitués à faire disparaître ont oublié de faire disparaître;

Maître Vergès a fabriqué de sa cliente, Djamila Bouhired, une torturée, ce qui fait sourire puisqu'on ne peut pas exclure que le Capitaine Graziani, son ...officier traitant, ait reçu d'elle des lettres. ..passionnées, écrites de sa prison.

 On ne nous a pas beaucoup découvert d'autres personnes torturées.

Si, sans prétendre être complet, ajoutons-y, Raymonde Peschard, disparue comme Audin, dont Vidal-Naquet doit reconnaître ce qui lui advint.
 Elle était tenue pour "disparue" et Jacques Vergès avait fait de cette disparition une des pierres d'angle de son plaidoyer Pour Djamila Bouhired.
Or le corps de Raymonde Peschard fut retrouvé, le 26 novembre 1957, après un combat contre le maquis.

On comprend que Vidal-Naquet se sente "seriné " par cet exemple.

Pour 1 'histoire, il serait théoriquement intéressant de savoir si l'ordre de recourir au besoin à la torture émane du pouvoir civil ou de l'autorité militaire.
 Des officiers mêlés à la Bataille d'Alger sont formels: "Le préfet Barret en a donné l'ordre", affirme le Capitaine Assémat, alors au 1er R.C.P.

 Mais le problème est assez théorique: peut-on imaginer réellement, le pouvoir civil ignorant, à Alger même, dans quelle mesure la torture était utilisée, alors que "chaque O.R. de régiment était flanqué d'une brigade de police judiciaire et/ou de gendarmes"?

Mais achevons d'examiner cette Bataille d'Alger avec pour souci de suivre l'action de ces mêmes hommes, généralement des troupes aéroportées, qui auraient pu successivement, mais à un court intervalle de quelques mois, passer de l'état d'anges noirs, tortionnaires et tueurs systématiques, pendant les deux batailles d'Alger en 1957, à l'état, sur les mêmes lieux, de purs archanges acclamés des foules musulmanes en mai 1958.

Sans doute l'énoncé du dilemme est-il posé de manière extrême: les archanges auraient-ils été moins acclamés qu'on ne l'a dit? ou peut-être même n'auraient-ils pas été moins tortionnaires qu'on ne s'est complu à le dire?

Et tout d'abord quels furent les moyens effectivement mis en oeuvre pour vider Alger de ses tueurs?

La présence de l'Armée et les moyens de diffusion: Premier moyen: la présence constante de quatre régiments, un régiment pour chaque "quartier", quelque quatre mille hommes disponibles en permanence contrairement aux services de police qui restent soumis à des horaires; ce seul fait retirait au F.L.N .sa liberté de manœuvre.

Et sans doute les militaires ne se sont-ils pas encombrés de procédures pour ordonner la levée des grilles de magasins; il s'en sont chargés.
 Cela seul transformait l'atmosphère.

Pour "dégeler la Casbah", Massu voit mettre à sa disposition tous les moyens de communication et de diffusion des services psychologiques, et c'est la première fois qu'est effectivement utilisée une C.H.P.T. (Compagnie de Haits Parleurs), pour inciter les parents à envoyer les enfants à l'école.

La Casbah n'obéit plus au F.L.N. Mais, bousculés dans leurs habitudes tranquilles, les réseaux de bombes n'ont pas disparu.

Le Dispositif de Protection Urbaine de Trinquier : Le Commandant Trinquier se charge de quadriller la Casbah par un système permettant en permanence d'en repérer les habitants donc tout corps étrangers.

Il est secondé par quatre officiers, "le commandant Aussaresse, les capitaines de la Bourdonnaye et Léger ,et le Lieutenant Garcet" ainsi que par un homme- clef dans ce dispositif "Surcouf, un sergent chef musulman algérien".

Trinquier en exposera la théorie dans "La guerre" : la ville décomposée en quartiers et en îlots - d'où l'appellation "îlotage" du système - groupes de maisons, où demeurent des familles.

 A chaque échelon, correspond un "chef", responsable des personnes logées dans son domaine et plus particulièrement des absents ou des personnes en surnombre dont il doit rendre compte.

 A chaque échelon correspondent des fiches identiques remises au chef d'échelon et à l'administration. Tout individu recensé est logé dans ce système avec un numéro minéralogique individuel qui reprend les chiffres ou lettres désignant son quartier, son îlot, son groupe de maisons.

 Dès le système en place, il fonctionne comme une souricière automatique; à Alger les tueurs du F.L.N. n'y échapperont pas. Car l'enregistrement initial n 'a opéré aucune sélection politique: les responsables sont choisis en raison de l'influence qu'on leur prête, personnalités locales, commerçants connus, etc., sans souci de leur orientation politique ; obligés de tenir leur fonction, ils ne seront objectivement pas moins utiles s'ils sympathisent avec l'adversaire; le recensement comprend fatalement les rebelles; "leur véritable nom sera inconnu ...de leurs voisins; mais les ralliés les reconnaîtront" Une fois établi, le système, baptisé D.P.U.,
 Dispositif de Protection Urbaine, fonctionnera parfaitement comme piège à rebelles et empêchera la mise en place de nouveaux réseaux importés.

Les premiers bleus de chauffe : Le dispositif allait être parfait par l'action du binôme Léger- Surcouf avec le lancement des bleus de chauffe, qui sont des ouvriers musulmans, recrutés par Léger, "logés" dans des entreprises, vêtus d'un bleu de travail, d'où leur nom, et qui seront successivement les rouages de la reconquête de la Casbah d'Alger, puis de l'intoxication et de l'autodestruction de la willaya d'Amirouche, enfin du ralliement des Musulmans au 13 mai.

Léger a observé le mode de vie à l'intérieur de la Casbah : de jeunes "mauvais garçons" y font la loi, celle du F.L.N. dont ils sont les groupes de choc, mais Léger est convaincu qu'il s'agit plus d'un phénomène sociologique de bandes qui se donnent un rôle que d'un engagement politique.
 
Il pense pouvoir les retourner, mais pour réussir, il doit prendre le risque de faire confiance à ceux qu'il retournerait et de les armer, pour qu'ils aient le sentiment de conserver un rôle analogue.

S'appuyant sur Surcouf, il constitue une toute première équipe, avec ces mêmes garnements qui peu auparavant, pour faire exécuter les instructions du F.L.N. de ne pas fumer, ni boire, ni jouer, ni écouter la radio, arrachaient les cigarettes aux fumeurs ...ou leur coupaient les lèvres, dispersaient les habituels jeux de dominos dans les cafés maures, brisaient les postes radio.

L'équipe, un Samedi, ose s'enfoncer dans la Casbah.

 Ses membres ont revêtu les bleus de chauffe habituels aux ouvriers musulmans.

 Ils sont certes reconnus.

 Dans un café maure, ils demandent des dominos et commencent d'y jouer, ils font mettre en route le poste radio; le cafetier n'ose pas refuser, pas plus qu'il ne refusait les ordres contraires auparavant; dans la foulée, ils fument, et les paquets sortent de toutes les poches.

Le retournement d'habitudes se répand vite.

 L'exploitation est immédiate: l'équipe intercepte tous les mauvais garçons repérables, leur prend leurs papiers d'identité avec injonction d'aller les retirer au poste de Léger.

 Les jeunes hommes en rupture de cartes d'identité viendront les retirer, demander leur incorporation à d'autres équipes de Léger, tout en apportant souvent leur obole: leur première dénonciation d'un responsable de cellule F.L.N.

 La Casbah a changé de camp.

 L'arrestation des survivants du réseau de bombes ne tarde pas.
 
L'exploitation de la victoire d'Alger: La première exploitation du succès, amorcée dès l'automne 1957, demeure une exploitation du type guerre psychologique, renforcée de procédures classiques de services secrets, c'est la diffusion de la bleuïte dont une étude de l'E.S.G.27 donne la définition suivante :

Bleuite : mouvement vrai ou fictif groupant certains cadres intellectuels de la rébellion favorables à des pourparlers avec la France et à un cessez-le-feu, définition un peu restrictive d'une épidémie qui sera étendue par les services français aux cadres non intellectuels des Willaya III surtout, mais aussi IV, et accessoirement V et VI et se traduira par des purges systématiques organisées par les chefs de ces willayas.

La deuxième exploitation, en mai 1958, ne mettra en oeuvre que des méthodes d'action psychologique et conduira les masses musulmanes sur le forum d'Alger.

L'épidémie de bleuite : Il suffisait d'oser prolonger l'opération des bleus hors de la Casbah; et de réussir.

 La structure de la Z.A.A. détruite rendait possible sa reconstitution avec Léger à sa tête ...pour quelques mois.

 Evacuant Alger, les dirigeants F.L.N. partaient pour l'étranger, les autres membres des réseaux s'efforçant de gagner le maquis, en Kabylie notamment.
 Léger introduit dans une filière vers la Kabylie l'un de ses hommes qui offre au comité de la Willaya III de reconstituer un réseau dans Alger.

L'offre est acceptée, et l'agent de Léger revient, doté d'un stock d'armes entreposé dans une cache.

 Il ne reste qu'à aller récupérer les armes.

 Le réseau fictif n'aura qu'un temps, la willaya s'inquiétant de l'absence d'attentats, encore que Léger ait réussi à en fabriquer fictivement un ou deux.

Mais s'est établi un circuit de relations entre rebelles et rebelles ralliés, et un circuit d'allers- retours vers le maquis: rebelles libérés, qui ne se savent pas porteurs dans les semelles de leurs chaussures par exemple - d'informations que les chefs rebelles découvriront et qui feront accuser de trahison d'autres rebelles; bleus feignant de s'être évadés et venant dénoncer des traîtres, en rapportant des informations découvertes par hasard pendant leur séjour dans un poste français et compromettant un chef rebelle.

 La bleuite s'est répandue.

 Elle fera des ravages, grâce à l'existence dans la rébellion d'un moral de suspicion, d"'espionnite", de bleuite donc.

 La bleuite prend d'autant mieux que la vie clandestine accentue les rivalités individuelles et sociales - notamment entre les intellectuels et les autres -, que la situation des rebelles est précaire, que la population bascule vers la France, que des cas de double jeu manifestes sont connus, tels que la valse-hésitation d'Azzedine, que dans une même famille algérienne des décalages d'attitudes se produisent entre des hommes restés au maquis et d'autres qui sont déjà ralliés, multipliant les zones naturelles de contacts entre adversaires donc les suspicions.

L'un des atouts majeurs des services français est la parfaite connaissance de l'organigramme rebelle et sa mise à jour en continu: prisonniers désespérés de garder le silence quand ils découvrent les informations déjà connues, sélection facile des objectifs, suspicion systématique entre rebelles qui se soupçonnent l'un l'autre de trahison devant le volume des informations détenues par leurs adversaires.

 Les résultats sont vite massifs en Willaya III, chez Amirouche; Harbi les reconnaît :

Selon le professeur Si Smaïl, responsable du service d'information de la Willaya III, la bleuite a fait près de 2.000 morts.

 A l'initiative d'Amirouche, l'espionnite se propage dans la Willaya IV puis dans les zones de la Willaya V qui leur sont limitrophes.

Le désastre de la Willaya III sera complété: son chef, Amirouche convoque une réunion des chefs de willayas; Tunis à son tour veut réunir ces responsables de l'intérieur.

 Se dirigeant donc vers Tunis, Amirouche et Si Haouès, chef de la Willaya VI, "dont l'armée française connaissait l'itinéraire" tombent dans une embuscade en mars 1959. Si M'Hamed, chef de la Willaya IV, sera tué peu après, et Lofti, chef de la Willaya V à son tour.

Entre temps la bleuite a débordé de Willaya III en Willaya IV où son succès militaire a été politiquement moindre du moins pour l'immédiat: la bleuite y fera seulement quelque cinq cents morts.

 Politiquement l'échec provisoire tient à un hasard : l'homme de la Willaya IV visé par les services français était Omar Oussédik dont l'énergie était l'un des facteurs de cohésion de la Willaya.

La procédure d'attaque a consisté à diffuser dans le réseau F.L.N. un faux compromettant un fidèle d'Oussédik, Khaled, responsable de la mintaka 43; aussitôt la willaya entrait en convulsion; les interrogatoires et les aveux extorqués se multipliaient, dans cette willaya que l'affaire Azzedine avait rendue sensible aux risques de ralliement; la purge se répandait; mais Oussédik que son chef direct Si M'Hamed, poussé par Amirouche, allait inculper, est sauvé de cette inculpation, car appelé à Tunis, il s'y trouvait alors et venait d'être... nommé Secrétaire d'Etat par le G.P.R.A.

 L'impact politique n'était que différé.

Les purges aidant, l'état de la willaya sera tel peu après que son nouveau chef Si Salah demandera un cessez-le-feu séparé.

Les bleus de chauffe et le 16 mai : En mai 1958, il ne s'est pas passé peu de choses: un coup de force populaire sur le G.G., coiffé par l'Armée, a conduit la France à changer de République.

 Mais les archives militaires accessibles se bornent à quelques feuillets dans un carton Comité de Salut Public, symbole de leur degré d'accessibilité dès qu'on approche un sujet sensible.

 A défaut d'archives, nous en revenons au témoignage d'un acteur principal, le Capitaine Léger.

Le 13 mai, les Européens sont seuls au Forum quand se constitue le Comité de Salut Public.

 Il en est de même les 14 et 15 mai.

Les Musulmans sont annoncés. Y croit-on vraiment? A la demande du Colonel Godard, trois hommes vont les faire basculer: Sirvent, Trinquier et Léger.

 Sirvent, officier pied-noir dont la compagnie, du 9e Zouaves, troupe nord-africaine, était restée seule dans la Casbah au temps de la terreur F.L.N.;

Trinquier qui avait mis en place quelques mois plus tôt le D.P.U. et qui a depuis pris le commandement de l'ancien régiment de Bigeard; Léger, qui relève encore de Godard, patron d'Alger- Sahel, et qui n'a pas quitté ses bleus de chauffe.

Le 15 mai, Sirvent décide de réunir les chefs d'îlots de l'organisation Trinquier.

 Souvent ce sont d'anciens combattants.

 Les chefs de groupe de Léger battent le rappel, ceux-là même qu'il a retournés quelques mois plus tôt.

Le débat fut, paraît-il, très ouvert, mais la décision ne se dessinait pas, quand un chibani livre la cause de la réticence des responsables d'îlots: "on a peur des Européens".

Les attentats n'étaient pas loin, ni les "ratonnades" qui plusieurs fois les avaient suivis.

Léger enlève la décision: "vous ne risquez rien; les bleus vous encadreront; vous serez acclamés".

 La décision est prise de se rendre au Forum le lendemain après-midi, après le travail.

 Décision de principe.

 Et Sirvent reste seul : Trinquier et Léger partent enlever le ralliement d'Oran.

 Le lendemain, la Casbah bouillonne, des groupes préparent drapeaux et banderoles, d'autres palabrent sur la composition de comités de salut public locaux.

 Mais que se passe-t-il en profondeur, que se passera-t-il quelques heures plus tard?

Et le soir, c'est un triomphe: la Casbah sort vers le Forum, hommes et femmes par milliers, reçus d'enthousiasme par les Européens qui manifestaient déjà.

Combien les Musulmans étaient-ils? Léger affirme: "20.000 facilement".
D'autres chiffres ont été avancés, volumes imprécis, chiffres discutés, mais la réalité était là, pétrie sans doute de motivations diverses dont les poids respectifs ne se mesurent pas: désir d'en finir avec la guerre et avec la terreur, ou avec l'angoisse qui avait d'abord accompagné le retour des forces de l'ordre, désir de retrouver une situation "comme avant" qui comprenait des relations familières avec les Européens, sentiment confus que les raisons profondes de révolte allaient déboucher sur une plus grande considération et dès lors avaient moins de raison d'être.

Le lendemain, le mouvement enflait, relayé déjà et les jours suivants par les trains et les cars déversant sur Alger les comités de salut public et les foules du bled.

Le Comité de Salut Public, dans sa motion N° 12, devançait Paris pour déclarer que "tous les citoyens de l'Algérie et du Sahara sont des Français à part entière.

 Le nouveau pouvoir appellerait les Français à voter une nouvelle constitution.

La réponse des citoyens d'Algérie ne ferait pas défaut, la constitution y étant massivement votée, nonobstant l'opposition du F.L.N.
Ce qui pouvait rester de rebelles dans le grand Alger, n'avait pas osé broncher.

 Le retournement de la population allait contribuer au dépérissement des katibas dans le bled.

Servilement copié sur Nicolas Kayanakis, " Algérie 1960, la victoire trahie " Editions Atlantis ISBN 3-932711-16-5

Ce même jour, François Mauriac cosigne avec Georges Arnaud, avocat du Collectif un article dans l'Expres où il dénonce les tortures dont Djemila Bouhired aurait été l'objet. On trouvera ICI un point complet sur l'affaire.
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