4 octobre 1957:
Les avocats de Yacef Saadi, Vergés et Kekrba expulsés d'Alger.
Un gardien de ferme assassiné à Parmentier.
Arrestation à Blida de 31 membres d'une cellule F.L.N.
Le journal chrétien "témoignage chrétien", vendu à la sortie des églises, parle des parachutistes:"Le mieux serait de les abattre nous-même en Algérie, car ils n'ont plus leur place dans un pays civilisé".
5 octobre 1957:
Pour la quatrième fois cette année, le porte drapeau de la section des anciens combattants de Mostaganem est assassiné, il s'agit de Hennouni Benserghit, il aura été porte-drapeau quatre mois, d'autres seront candidats, ils seront également assassinés.
6 octobre 1957:
Le général (C.R.) Billote publie dans le Monde un article qui dénonce l'usage de la torture. Après le 13 Mai il rejoindra les gaullistes de gauche.
7 octobre 1957:
Assassinat à Paris d'un des bras droit de Messali Hadj Filali.
Au lendemain du congrès du RDA de Bamako où Abdallah Filali et Ahmed Bekhat
(tous deux du MNA) reçoivent un accueil chaleureux,
les commandos du FLN assassinent Ahmed Semmache, responsable USTA
de la Région parisienne, Hocine Maroc, responsable des usines Panhard,
Mellouli Said, responsable de Renault-Billancourt.
C'est ensuite le tour d'Abdallah Filali,
abattu le 7 octobre et du secrétaire général,
Ahmed Bekhat, assassiné le 26 octobre. En un mois,
des dizaines de cadres syndicalistes sont tuées et la direction qui
avait organisé le Congrès de juin 1957 est décapitée.
Ces crimes contre des syndicalistes algériens soulèvent une émotion
d'autant plus grande que l'USTA constituait un cadre indépendant de tout parti,
ouvert à tous les travailleurs musulmans et français d'Algérie
et qu'il s'appuyait sur le mouvement ouvrier français et international.
Les obsèques de Ahmed Bekhat et de Abdallah Filali sont suivies par
les dirigeants du SNI, du SNES, du SERP, de la FEN et par des centaines
de militants ouvriers français et algériens.
Mais les dirigeants des grandes centrales, la CGT-FO, la CGT et la CFTC,
ainsi que tous les partisans du FLN sont absents.
La Commune de novembre dénonce le silence des amis du FLN et elle exige
de la CISL qu'elle condamne fermement les attentats et le silence de l'UGTA.
Elle publie aussi un Appel de Messali Hadj au peuple algérien pour que cessent
les massacres. Le meurtre des principaux dirigeants de l'USTA porte un coup sévère
au jeune syndicat. Après Melouza, il crée un climat de terreur qui amène
de nombreux syndicalistes à assurer la protection de leurs familles en se
soumettant au FLN ou en adhérant à l'AGTA, liée à la CGT et au PCE
Des unions locales et des régions entières n'existent plus qu'en s'appuyant
sur un groupe restreint de cadres aguerris. "L'immigration algérienne en France
des origines à l'indépendance" (en fait une hagiographie du MNA et de Messali, par Jacques Simon, ISBN 2-84272-082-2
8 octobre 1957:
Au cours d'une opération dans la casbah d'Alger une très violente explosion détruit deux immeubles et fait 5 morts.
Les paras, sur indication de Yacef Saadi ont découvert la cache d'Ali la pointe. Ali refusant de ses rendre, pour l'ouvrir,
ils posent une charge de plastic, qui fait exploser tout le stock d'Ali la pointe.
Il y a quatre morts, un terroriste, une jeune poseuse de bombe, Ali la pointe, proxénète reconverti dans la pose de bombes et le neveu de Yacef Saadi, Omar.
Ali la Pointe fut un ami très intime de germaine Tillon.
D'après des sources ultérieures, en fait l'explosion fit 20 morts, de nombreux immeubles environnant dont les habitant avaient regagné leur domicile s'étant écroulé sous le choc de l'explosion..
Saadi est une des grandes figures actuelles des gouvernements algériens et français. Chirac l'a en 2003 à Alger, embrassé comme du bon pain.
Le capitaine Bonnel, ancien du premier REP, raconte dans Historia, numéro 233 page 1206:
"Nous avions dans ma compagnie un officier de police adjoint, S. Pied-noir d'Alger, c'est un ami d'enfance de Yacef Saadi,
avec qui il a joué au football, dans le même club, en d'autres temps.
Même avant l'arrestation de Yacef, il lui arrivait de rendre visite à la mère de ce dernier.
Le 7 octobre, donc, deux semaines après la capture de Yacef, S ... obtient l'autorisation de conduire la mère auprès du fils.
Que s'est-il passé pendant cette entrevue? S ... n'a jamais donné beaucoup de détails. Toujours est-il que Yacef Saadi lui indique la seule cache inviolée de la Casbah,
disant qu'Ali la Pointe n'a pu se réfugier qu'à cette adresse-là, 5, rue des Abdérames.
En revanche, il demande la vie sauve pour Ali, et surtout, pour son neveu, Omar. La rue des Abdérames est en haute Casbah.
Le soir même, l'opération est menée, de façon classique. Quartier cerné, îlot contenant la cache investi par la 2e compagnie de combat.
On fait évacuer la population des maisons comprises dans l'îlot. Il est minuit. Nous menons toujours nos opérations après l'heure du couvre-feu.
Revêtu d'une djellaba dont le capuchon lui recouvre en partie le visage, Yacef Saadi est mené, en grand secret, 5, rue des Abdérames.
Il entre dans la maison vidée de ses habitants, se dirige au premier étage, nous fait déplacer un divan et nous montre, sur le mur,
la trace de l'entrée de la cache, un rectangle d'environ 40 cm sur 50. En réalité, il ne fait que confirmer, par les gestes, ce qu'il a déjà dit à S ...
Nous le gardons à proximité pour qu'il nous serve éventuellement d'intermédiaire, dans nos conversations avec Ali.
Le régiment est, à cette époque, sous les ordres du commandant Guiraud, adjoint du colonel Jeanpierre,
blessé lors de l'arrestation de Yacef, le 24 septembre.
Ali la Pointe a la réputation, réputation qui nous a été d'ailleurs confirmée par les interrogatoires de Yacef, d'être courageux et même féroce comme un fauve.
Il possède, dans sa cache, de l'armement et quatre bombes.
Que va-t-il faire? nous essayons d'abord de parlementer avec lui.
Nous frappons à la porte de la cache et nous lui parlons à l'aide d'un mégaphone:
- Rends-toi, Ali, c'est fini, Yacef est ici, nous te promettons la vie sauve.
A son tour, Yacef lui répète en gros ce que nous venons de dire.
Mais c'est le silence complet. Silence qu'explique peut-être l'épaisseur du mur de la cache.
Nous répétons notre appel à plusieurs reprises.
Craignant une réaction désespérée d'Ali, nous faisons évacuer le bâtiment
par tous les légionnaires qui ne sont pas absolument utiles.
Ne restent dans la maison que les officiers de renseignements nous sommes deux -
et le capitaine commandant la 2e compagnie de combat.
Après plusieurs tentatives de prise de contact avec Ali la Pointe, il nous faut prendre une décision.
Maintenant, le bouclage de l'îlot s'est desserré, seule la maison du 5, rue des Abdérames est tenue solidement.
Il est fort probable que les populations évacuées en ont profité pour réintégrer leurs maisons en douce. Dans les maisons de cet îlot, il y a celle de Yacef Saadi, celle d'Amar Ouzegane.
Parmi les officiers participant à l'opération, deux tendances:
1) Faire sauter la cache, solution qui évite d'exposer la vie de légionnaires pour un assassin qui, pris vivant, a toutes les chances, comme Yacef Saadi, de sauver sa tête.
On ne pourra jamais parlementer avec Ali la Pointe;
2) Essayer de forcer l'entrée de la cache à la pioche.
C'est un risque énorme, chacun se rappelant, d'ailleurs, la défense de Mourad et Kamel, responsables F.L.N.,
cernés dans la Casbah, impasse Saint-Vincent-de-Paul, le 27 août, et qui n'avaient pas hésité une seconde, se sentant pris au piège, à abattre un adjudant et un caporal-chef de la compagnie du 9e zouaves cantonnée dans la Casbah,
avant d'user des bombes dont ils disposaient contre le 3e R.P.C., qui cernait leur cache. Pour nous, de grosses pertes sont possibles, en dépit du rapport des forces, compte tenu de l'entrée de la cache d'Ali.
Finalement, le commandant Guiraud décide de prendre une demi-mesure qui consiste à faire sauter la paroi qui obstrue cette entrée avec une ou deux mines ruches.
Celles-ci perceront la cloison sans faire exploser les bombes, et les occupants de la cache ont une chance de n'être que choqués par l'explosion.
Un élément du génie est alors appelé. Heure H : 5 heures. Un groupe de sapeurs vient se mettre à la disposition du capitaine commandant la 2e compagnie de combat. (...)
L'explosion est d'une violence inouie. (...) A moins qu'Ali la Pointe n'ait possedé d'autres explosifs qu'il ne nous avait pas signalé à travers sa correspondance avec Safi.
C'est en tout cas cette version que je vais porter au P.C. du corps d'armée d'Alger, et que l'officier de presse donnera aux journalistes."