Rabah Kheliff
Né en Kabylie en 1933, fils d’un officier français, le jeune Rabah Kheliff devient très tôt enfant de troupe. En 1951, ayant atteint ses 18 ans, il s'engage pour aller combattre en Indochine. Après trois années de campagnes et de combats, il est de ceux qui défendent Dien Bien Phu jusqu'au bout. Blessé et fait prisonnier, il est libéré et rapatrié en métropole en 1954
Le conflit franco-algérien ayant commencé, il repart pour l'Algérie, où il sert comme officier durant six années. Puis, en cette funeste journée du 19 mars 1962, un cessez-le-feu unilatéral est décrété par le gouvernement français.
Trois mois plus tard, le 5 juillet 1962, le lieutenant Rabah Kheliff se retrouve à Oran, à la tête de sa compagnie de Chasseurs. C'est le jour de la proclamation de l'indépendance. Des instructions écrites du gouvernement français de l’époque, approuvées par le général Katz, commandant la place d’Oran, ordonnent aux soldats français de rester dans leurs cantonnements, quels que soient les troubles.
Ces ordres irresponsables sont transmis par le général Katz à tous les officiers qui commandent les 12.000 soldats, gendarmes et CRS, stationnés dans les divers quartiers de la ville d’Oran. La tragédie va alors commencer avec le massacre épouvantable de plusieurs milliers de civils européens et musulmans abandonnés, sans distinction de sexe ou d'âge, massacre commis par des fanatiques algériens déchaînés, avides de sang, devenus de véritables bêtes sauvages.
Choisissant le chemin de l'honneur, le lieutenant Rabah Kheliff, désobéissant aux ordres, s'oppose fermement avec sa compagnie de Chasseurs, aux responsables de l'ALN, qu'il persuade de libérer plusieurs centaines de civils promis à une mort certaine.
Son courage portant ses fruits, les soldats de l'ALN quittent les lieux, ce qui permet aux Chasseurs de libérer les prisonniers afin de les accompagner en lieu sûr. S’étant quelque peu éloigné de sa compagnie, il est lui-même pris à partie et blessé par des émeutiers, mais dégagé par ses hommes, à qui il interdit d’ouvrir le feu. Après ces terribles péripéties, il organise des patrouilles sur les routes menant vers le port et l’aéroport afin de permettre l'évacuation de ses protégés.
A la suite de ces tragiques évènements, et pour avoir sauvé des centaines de vies humaines, le lieutenant Rabah Kheliff est mis aux arrêts de rigueur, et convoqué par le général Katz qui lui assène ces paroles abjectes: « Si vous n'étiez pas arabe, je vous casserais! ».
Le capitaine Rabah Kheliff est ainsi l'un des rares officiers à avoir osé enfreindre les ordres infâmes du général Katz qui s'est rendu complice de l'abominable tuerie perpétrée ce jour là, alors que des milliers de militaires français devaient rester cantonnés dans leurs casernes, sans venir au secours de leurs compatriotes que l'on égorgeait dans la ville...
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Après son retour en France, dès sa mise à la retraite de l’Armée, le capitaine Rabah Kheliff fonde l'Union Nationale des Anciens Combattants Français Musulmans (UNACFM), dont il assure la présidence jusqu'en 2003. Durant des années, il se consacrera sans relâche à la défense des droits de ses camarades de combat français musulmans.
Le capitaine Rabah Kheliff nous a quittés le 3 novembre 2003 à Lyon, à l'âge de 70 ans, des suites d'une longue maladie. Après une cérémonie à la mosquée de Lyon, il a été inhumé au nouveau cimetière de Cusset.
Le capitaine Rabah Khéliff était commandeur de la Légion d’Honneur et de l’Ordre National du Mérite, titulaire de la Croix de guerre des T.O.E., de la Croix de la Valeur Militaire et de la Croix du Combattant Volontaire, ainsi que de plusieurs autres décorations. Il laisse à tous ceux qui l'ont connu l'image d'un homme courageux, pétri de bonté, de sagesse et de patriotisme.