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 Les Djebels de la Medjerda

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MessageSujet: Les Djebels de la Medjerda   Les Djebels de la Medjerda Icon_minitimeMer Fév 25 2015, 15:29

G10



Les Djebels de la Medjerda



Opération «1202 » entre la vallée de l'oued Boubous et la frontière tunisienne.

Au village de Duvivier notre base avancée régimentaire, les paras Bigeard sont de retour d'une opération de 96 heures. L'escadron a transpiré avec la chaleur arrivant dans ces vallées encaissées avec un relief très tourmenté entouré de petits djebels donnant l' impression d'être enfermé dans une arène.
L'Escadron se refait une santé après quatre jours d'efforts durant une opération dans la région de Gounod, site de ma première opé. La recherche de contact avec l'ennemi qui se dérobe met les nerfs en boules, les pistes à peine praticables, des marches incessantes jour et nuit, éprouvent les muscles des jeunots.
Le signal des préparatifs de départ pour une nouvelle «bandera »nous est donné par le sergent Dalmasso notre chef de groupe ( un ancien d'Indochine avec deux séjours ) pour lui cela n'est que routine il n'en fait pas plus cas qu'une promenade de vacances, il n'est pas émotif, alors que la fébrilité dans mon groupe est perceptible. J'en suis à ma deuxième opération, la première fût pour moi un calvaire, avec des pieds en marmelade et le moral cassé. Les bottes de saut ne me réussissent pas, si j'avais eu des rangers! J'ai entendu dire que des gars marchaient avec des «jungle-boot» ah si je pouvais en avoir une paire ? Mais il ne faut pas rêver.
Pourtant des régiments marchent avec des chaussures en toile et dessous caoutchoutés qu'ils appellentt des «pataugas», je vais voir cela de plus près avec mon pote Martignon ayant les mêmes problèmes que moi.
Je suis passé dans l'équipe FM 24/29 pourvoyeur avec comme arme un fusil MAS 36 crosse alu repliable longueur plié 96 centimètres. Chargé autant qu' un mulet, deux sacoches contenant 5 boites chargeur de 920 grammes celà donne 9kg200 battant le long des cuisses et accrochées sur les boucles du ceinturon lui même retenu par un brellage, genre de bretelles renforcées fixées sur le ceinturon. Sont également accrochés, bidon d'eau, cartouchières du fusil, deux grenades, le poignard, une trousse à pansements ( parfois accrochée soit sur le haut du brellage ou en bas de la jambe.
La musette TAP* contient les boites de ration (d'un kilo) pour 24 heures ou plus en fonction de la durée de l'opération, la boule de pain, le pull vert kaki, la veste molletonnée, le nécessaire de toilette, la gamelle, cuillère/fourchette, le quart étant encastré dans le fond du bidon, et le petit matériel pour se suffire à soi même, savon, rasoir, papier à lettre/enveloppes, crayon, et une dotation de munition en vrac de 90 cartouches de 7,5, et bien sûr mon carnet de route et parfois mon appareil photo, et bien sûr la pelle repliable type USA.
Devenu pourvoyeur du fusil mitrailleur 24/29, avec trois de mes camarades, un tireur FM et un chef de pièce, cet ensemble forme l'équipe. Le moral et l'allant font partie de mon caractère. Je cache mes doutes au fond de moi même et montre toujours un visage jovial, j'ai souvent la blague aux lèvres cela détend le climat parfois grincheux de l'équipe. Cette deuxième opération va nous mettre au pied du mur.

20 avril 1956

Après avoir pris un bon repas chaud, le départ est donné à vingt heures, nous grimpons dans les GMC de la compagnie du train, les musettes TAP poussées au fond du camion,
les camarades nous donnent un coup de main pour monter, assis sur les banquettes face à face, les bâches soulevées et attachées sur les montants de façon à gicler des véhicules à la moindre alerte . Direction Souk-Ahras puis Lamy, très très prêt de la frontière tunisienne, beaucoup de rebelles dissimulés dans les parages mais invisibles à nos yeux. Nous roulons jusqu'à minuit, débarqués en silence nous nous infiltrons dans ce paysages de montagnes. Le point effectué par le commandant de compagnie Le Boudec, les chefs de pelotons prennent l'itinéraire reconnu. Le départ par compagnies vers un point donné par Bigeard se fait sans heurts ni palabres, les paras deviennent des félins à la recherche de leur proie.
Les compagnies de transport seront notre moyen de rejoindre notre point de départ dans le djebel, et de nuit en général, je tire mon chapeau aux chauffeurs qui par tout les temps et souvent sans éclairage nous amèneront à notre point fixé et seront toujours au rendez-vous pour le recueil des compagnies ivres de fatigue, nous les bénirons ou les maudirons dans nos marches sans fin, épuisés après des nuits sans sommeil et le ventre creux, sur les pistes du djebel ou dans les sables de Timimoun, dans la neige, le froid, la pluie grelottant dans nos pauvres habits détrempés par l'humidité ou la sueur sous le soleil torride des Aures.

Nous sommes un régiment parachutiste qui va devenir un des meilleurs de la 10e DP, mais pour cela il va falloir souffrir beaucoup souffrir, faire de notre corps un objet résistant et dur au mal, savoir souffrir en silence.

Le secteur où nous marchons est extrêmement boisé dans des escarpements digne d'un alpiniste, la piste s'allonge dans un tracé fait par les chèvres, et des hommes habitués à arpenter cette nature sauvage. La nuit est d'encre et les passages couverts de chênes-liège. Nous marchons en aveugle tête à cul, me cognant sans arrêt sur mon camarade qui grogne des mots inintelligibles, les à coups provoqués par des haltes brusques sont dûs au fait que la colonne se disloque à la moindre embûche, le para pour coller au suivant, accélère afin de garder sa distance de marche, le contact dans ce noir absolu est brutal mais nous savons nous taire, une main toujours en avant pour palper l'obstacle. Dans de telles conditions, la marche devient pénible et les à coups coupent les jarrets qui tremble dans l'effort. Dans nos futures opérations nous aurons une pastille fluo collée sur la musette, visible à deux mètres cela nous aidera bien dans ces marches de nuit.
Après quatre heures de montée en aveugle, nous arrivons au sommet du djebel, les arbres sont plus rares. La silhouette du gars me précédant devient visible malgré le ciel sans lune. Pas un son de gamelle ni de cliquetis d'armes, le silence est complet nous devenons des oiseaux de proie, seul le halètement court des camarades sont perceptibles par les efforts fournis, ce n'est pas le cas des unités que nous croisons parfois au hasard de nos opérations éclairs, on les entend à des kilomètres à la ronde, ceux là ne doivent pas tomber souvent nez à nez avec des rebelles.

Je commence à ressentir les efforts donnés. Dans la descente d'une portion de piste assez raide, je trébuche et vais m'étaler en contre-bas mon corps reste bloqué contre un buisson, sans une parole je remonte sur les genoux sur la piste, j'ai perdu mon groupe, la section passe sans s'arrêter, je me glisse dans la file jusqu'au passage d'un oued où l'eau nous arrive à mi-mollets, j'en profite pour remonter la colonne et rentrer dans mon groupe, ma main est abimée et j'ai une bosse à la tête mais la casquette est toujours sur mon crâne, il est temps, les sections éclatent pour des positions d'embuscades.
4 heures. Après une remonté sur 1000mètres, l'embuscade est établie jusqu'au levé du jour. Je suis à côté de ma pièce FM André Jeanneret le tireur, géant à la force tranquille et un camarade agréable, je m'entend à merveille avec lui, sa puissance est réelle il me porte sur son dos avec tout mon équipement et le sien comme si de rien n'était. L'attente est dure à supporter sans bouger, à cette altitude le froid vif me fait claquer des dents, je ne suis pas le seul , le bruit des dents d'André me résonne aux oreilles. Nous sommes côte à côte dans l'attente d'un évènement, d'un bruit, ce serait pourtant la délivrance, le ressort qui nous donnerait la bouffée d'adrénaline. Il fait froid dans le djurjura en altitude nous devons frôler le zéro°.
Le jour se lève lentement dans ce massif montagneux de l'oued Boubous, la forêt assez dense laisse difficilement pénétrer les première lueurs de l'aube. Nous levons l'embuscade ce qui nous permet de faire un frugal petit déjeuner constitué d'un café froid d'un bout de pain avec une pâte de fruit. Les voltigeurs manœuvrent au fond de l'oued, nous les appuyons en avançant à la même allure dans un dédale de rochers difficiles a passer. Toute la compagnie avance à la même allure pour que le ratissage soit minutieux, les grottes sont inspectées et les anfractuosités rocheuses également avec beaucoup de précautions.
Ordre est donné par le sergent Dalmasso de stopper notre avance. Le FM en protection avec un gars de surveillance allongé, le doigt sur la détente pendant que l'équipe mange . Il est 9 heures, le soleil vient nous réchauffer de ses rayons déjà chauds, il nous sèche de l'humidité et de la transpiration, laissant des auréoles sur la veste camouflée. La boite de ration est vidée à moitié de son contenu, les sardines et le pâté de Pousauge fabriqué en Vendée, sont engloutis.
J'entends les gars qui s'interpellent au fond du cours d'eau ils peinent en s'accrochant aux épineux lentisque ou autres, les mains le visage griffés, ils se débattent dans une végétation luxuriante mais hostile , certains sont obligés de pénétrer dans l'eau pour contourner des blocs de roches.
La progression ne faiblit pas, le sergent nous déploient plus largement, Jeanneret à grandes enjambées positionne le FM suivi de l'équipe. Martignon et Groisil se chamaillent, ce qui fait pousser une gueulante du chef, moi je ferme mon clapet, j'ai assez de ma charge et garde mon souffle pour la fatigue à venir.
14 heures. Une halte sur le sommet du djebel, permet au lieutenant de faire le point avec le capitaine Le Boudec par radio. Une heure de pose, je suis sur les genoux et il n'y a pas que moi, les 25/30 kilos de charge pèsent lourd ! terriblement lourd pour des épaules pas encore tannées par les frottements des sangles du bréllage et de la musette TAP, je commence à avoir les pieds en marmelade. Ah si j'avais de l'argent pour m'acheter une paire de rangers souple, cela me dispenserait de marcher avec cette paire de bottes faite c'est à croire avec du cuir d'éléphant.
La soirée passe dans la fouille de rochers creusés de trous capable de cacher des centaines de combattants rebelles, des traces de passages nous donnent la preuve qu'elles servent de lieux de repos aux katibas* de passage. J'en parle au sergent qui me confirme que nous sommes certainement épiés par des choufs*, souvent de très jeunes bergers avertissant les rebelles de tous nos mouvements.
Un Piper*, fait des passages fréquents et doit donner des indication à «Bruno*», donnant les indications sur des possibles mouvements suspects dans notre zone de fouille .

Le soir nous retrouve sur un djebel de 1000 mètres de haut d'où le panorama est magnifique, des ondulations boisées à perte de vue, des talwegs* ou coulent des oueds à l'eau si fraiche, alors que je n'ai presque plus rien dans mon bidon je suis un peu jaloux de la voltige qui peut boire à volonté de cette eau si limpide. Nous nous positionnons pour la nuit je fais mon trou individuel avec ma pelle US et le garni d'herbe et de feuilles pour adoucir cette couche improvisée..
Interdiction de faire le moindre feu. Plusieurs groupes partent en embuscade, je reste avec le PC du capitaine Le Boudec à monter la garde avec le groupe.

21 avril
Le peu de sommeil m'a donné de la vigueur malgré le froid et l'interdiction de faire du feu, Martignon marmonne: -On voit pas un félouse* pas la peine de continuer !
-Attend qu'ils arrivent, tu verras! .. Répond Cadet
Vers 9 heures autorisation de faire du feu sans fumée, je réussi un feu minuscule dans un trou creusé au poignard avec quelques brindilles que j'avais ramassées hier, deux petites pierres plates de chaque côté pour poser le quart, le tour est joué.

La fouille reprend sur le versant boisé, pendant que d'autres compagnies encerclent la zone à traiter. Une compagnie découvre au fond d'une grotte des couvertures de laine, preuve que cet endroit sert de relais, et surtout il a fallut une fouille minutieuse dans cet endroit indétectable, il va en être ainsi toute la journée dans une marche incessante avec les nerfs à vifs. A croire que nous courrons après des fantômes, encore une embuscade toute la nuit, planqués entre deux rochers en surplomb de la piste, nous allons ainsi faire le guet jusqu'à 6 heures le lendemain matin.

22 avril.
Rien ne se passera, le jour se lève rapidement en haut de ce djebel. Martignon nous a fait un café chaud, je m'allonge et dort jusqu'à dix heures. Nous reprenons la piste pour rejoindre le PC Le Boudec. Nous descendons vers des mechtas que nous fouillons avec minutie, des traces de feu prouvent que des rebelles ce sont reposés ici.
Le soleil chauffe et finit de dégourdir nos membres perclus de douleurs par deux nuits d'embuscade avec si peu de repos. Nos tenues sèchent rapidement avec des trainées de sel sur la veste camouflée qui tient debout par l'empesage du à l'élimination de ce sel que nous compensons par absorption de cachets contre la déshydratation, la nivaquine contre le paludisme, l'eau que nous buvons n'est pas toujours claire, nous la prenons au hasard de nos marches dans des trous d'eau stagnants plus que douteux.
Dernière nuit d'embuscade, car nous sommes repérés depuis le matin, des silhouettes se distinguent à la jumelle en haut des djebels, est-ce les nôtres? mystère? Le bivouac est devenu plus cool, je fais du feu pour un potage avec du pain dedans, une boite de pâté engloutie en deux minutes, l'habitude du vite fait manger n'est pas un rituel mais une nécessite de s'alimenter. Un tour de garde viendra me réveiller d'un sommeil profond, deux heures à maintenir les yeux et le cerveau en éveil est pénible, je me recouche pour m'endormir comme un bébé la fatigue aidant.
Demain nous rentrons à la base avancée.

23 avril.
Cela fait 20 jours que je suis sur le sol d'Afrique du Nord et déjà je n'ai plus la même vision des choses, notre condition de vie nomade nous rapproche de la nature et nous adapte aux conditions les plus rudes les plus rustiques, le corps devient résistant à l'effort, à la fatigue, au sommeil, à la nourriture prise à n'importe quel moment, simplement pour alimenter le corps et non pas l'estomac. La camaraderie dans la cohésion du groupe, nos chefs sont plus près de nous et subissent les mêmes souffrances, endurent les mêmes maux sans jamais faire apparaître un signe de défaillance et pourtant ils sont comme nous, mangent comme nous, marchent comme nous sans jamais se plaindre, et d'abord à qui se plaindriait-ils?.
Le départ pour rejoindre les camions nous remplit d'une joie intense, les dix kilomètres de pistes sont faits allègrement, à dix heures, nous montons dans les bahuts, une heure de route et ouf! Nous voilà à Duvivier, rassemblement pour une vérification général du matériel, et tout le monde se précipite aux douches pour un décrassage profond du corps. Que c'est bon de pouvoir rester sous l'eau à se savonner la carcasse. On s'entraide pour un frottage énergique du dos, les blagues fusent entre paras, la détente est joyeuse, on parle de sortie et de filles, à 19 ans quoi de plus normal.
La fatigue disparaît aussitôt lorsque le sergent nous donne quartier libre pour une détente de quelques heures dans le village, faire des achats, de la nourriture en extra, tenue camouflée impeccablee, bottes cirées, casquette Bigeard neuve sur la tête, sousl'œill du sous-off qui a du travail à remettre au chef de section,. Demain revue d'armes et contrôle des paquetages pour le linge HS*.

Cette opération lancée par le colonel Bigeard commandant du 3e R.P.C avec son effectif au complet, servira de tremplin aux opérations à venir avec la mobilité, la rapidité, et la puissance de feu transportée à dos d'hommes, fera de nous un régiment des plus disponibles 24 heures sur 24, nous serons appelés à nous battre sur tous les fronts, des engagements durs contre un adversaire de plus en plus redoutable n'infléchira pas notre devise « ÊTRE ET DURER ».
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Commandoair40
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MessageSujet: Re: Les Djebels de la Medjerda   Les Djebels de la Medjerda Icon_minitimeMer Fév 25 2015, 18:19

Merci Gus

Les jolies colonies de vacances  Very Happy

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Sicut-Aquila

Les Djebels de la Medjerda 908920120 Les Djebels de la Medjerda Cocoye10 Les Djebels de la Medjerda 908920120

« Je ne suis pas abattu, je n'ai pas perdu courage.
La vie est en nous et non dans ce qui nous entoure.
Être un homme et le demeurer toujours,
Quelles que soient les circonstances,
Ne pas faiblir, ne pas tomber,
Voilà le véritable sens de la vie ».

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