Le Conseil constitutionnel examine ce mardi le cas d’un homme naturalisé en 2003 et qui, par décret, s’est récemment fait retirer sa nationalité française après avoir été condamné pour terrorisme. Une décision aujourd’hui contestée.
L'Etat peut-il retirer la nationalité française aux personnes accusées de terrorisme ? C’est l’épineuse question sur laquelle va se pencher le Conseil contitutionnel ce mardi, soit moins d’une semaine après les attaques terroristes qui ont eu lieu à Paris en banlieue.
Seuls 8 cas de déchéance de nationalité française depuis 1973
Le Conseil constitutionnel doit en effet examiner la validité de la déchéance de la nationalité française d’un franco-marocain, Ahmed Sahnouni. Naturalisé en 2003, cet homme a perdu sa nationalité française le 28 mai dernier, après avoir été condamné pour "association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste" en 2013. Ce décret avait lors été signé par le Premier ministre Manuel Valls et le ministre de l’Intérieur, Bernard Cazeneuve. Il y a deux ans, le tribunal de grande instance de Paris l’avait condamné à sept ans de prison et à la privation de ses droits civiques et familiaux. La justice lui reprochait notamment d’avoir organisé une filière de recrutement de candidats au djihad en Afghanistan, en Somalie et en Irak. Il y aurait également joué un rôle de coordinateur opérationnel sur le terrain.
Le décret qui a valu à Ahmed Sahnouni de perdre sa nationalité française s’appuie sur l’article 25 du Code civil qui prévoit qu’un "individu ayant acquis la nationalité française peut, par un décret et après avis conforme du Conseil d’État, être déchu" de cette nationalité notamment s'il a été condamné pour "un crime ou un délit constituant un acte de terrorisme". Cet article n’a cependant été que très peu de fois utilisé : huit fois depuis 1973.
Dans le but de l’extrader ?
Son avocat, Me Nurettin Meseci, a contesté la validité du décret devant le conseil d’État, qui a accepté le 31 octobre de transmettre une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) au Conseil constitutionnel. Dans sa QPC, le conseil d’Ahmed Sahnouni explique qu’il compte notamment plaider ce mardi la rupture d'égalité entre Français de naissance et Français naturalisés introduite par ce texte. Selon lui, l’objectif de cette déchéance serait de pouvoir "extrader" le condamné "vers le Maroc où il risque d’être à nouveau condamné pour les mêmes faits à 20 ans d’emprisonnement".
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L’examen de ce décret prend une nouvelle dimension au vue des récents évènements qui ont secoué la France. Le plus haut niveau du plan Vigipirate a été actionné et des milliers de militaires ont été déployés un peu partout sur le territoire pour sécuriser les lieux de cultes israélites. La question du retrait de la nationalité française de binationaux condamnés pour terrorisme est par ailleurs régulièrement brandie par la droite et notamment le Front National.