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JEUDI 20 JUIN :
2 H : Un renfort composé de 2 compagnies d’élèves Aspirants de Réserve d’infanterie de St Maixent, est affecté au secteur de SAUMUR. Le secteur de GENNES ayant été fortement attaqué la veille, le Bataillon de St Maixent reçoit l’ordre de se porter avec une Compagnie d’accompagnement, à l’Ouest de GENNES pour renforcer la Compagnie ROIMARMIER.
4 H 05 : Très violent bombardement sur les lignes à GENNES, et sur les observatoires de la crête du Château à Saumur.
Tir violent d’interdiction sur les voies d’accès de Saumur, principalement dans la vallée du THOUET, et axe BAGNEUX-DOURNAND.
.Attaque générale sur tout le secteur, et plus spécialement sur GENNES et SAUMUR.
les événements vont se précipiter, et se localiser, aussi il est indispensable pour la clarté du déroulement des différentes actions, de diviser les opérations en trois parties :
*Action sur GENNES — Action sur SAUMUR — Action sur MONTSOREAU.
A -ACTION SUR GENNES :
20 JUIN à 3 H 10 : Ordre est donné par le Commandant d’Etat-Major au Capitaine FOLTZ, d’envisager son action sur GENNES de la façon suivante :
1- Appuyer le peloton DESPLATS, isolé dans l’Ile ;
2 - Contre-attaquer au besoin, pour rejeter à l’eau tout ennemi ayant pris pied sur la rive Sud de la Loire ;
3 - Interdire toute progression en direction des grandes rocades :
GENNES - CHENEHUTTE ; GENNES — COUTURES
et des pénétrantes :
GENNES - MILLY le MEUGON ; GENNES - LOUERRE.
4 Heures : L’Escadron du Capitaine FOLTZ est en place pour exécuter sa mission.
4 H 50 : Bombardement intense de l’Ile de GENNES et des rives Sud de la Loire, et tirs très violents des engins blindés sur l’Ile. De nombreuses barques blindées ennemies, contenant chacune de 10 à 15 homme traversent le bras Nord de la Loire, et l’ennemi prend pied dans l’Ile
Combats violents et résistance acharnés de la Brigade DESFLATS et des Tirailleurs qui, après une lutte corps à corps sont submergés. Le Lieutenant est mortellement blessé par un obus.
• L’ennemi occupe alors l’Ile de GENNES, et essaye de franchir la Loire à l’Ouest de l’Ile avec plusieurs barques. Intervention réussie par le feu des éléments du Lieutenant ROIMARMIER. Mais un trou s’est produit à la gauche de ces éléments par suite du repli sans ordre du lieutenant CHAUMAT, entre 2 et 3 heures du matin avant l’attaque. L’ennemi prend pied sur la rive Sud à cet endroit.
Le groupe ROIMARMIER gagne un bois, 50 mètres en arrière, d’ou il se replie sur, VIHIERS. Le Lieutenant ROIMARMIER a glorieusement disparu au cours de cette opération, déchiqueté par un obus.
de 8 H à 13 H : la situation devient critique. L’ennemi réussit à débarquer par un trou de 1.000 Mètres. Des infiltrations ennemies se produisent dans les bois entre CUNAULT et GENNES.
L’Escadron FOLTZ est pris à partie par le feu de l’ennemi de face, à sa gauche et à sa droite.
Le Lieutenant BONNIN pendant la défense de GENNES est mortellement blessé par un espion (officier allemand en civil).
13 H 30 : Arrivée auprès du Capitaine FOLTZ, du capitaine CHOPPIN, officier de liaison du Commandant d’Etat-Major, qui leur annonce l’arrivée imminente d’un renfort composé de 2 chars, et d’un peloton moto du groupe NEUCHEZE, avec lequel il doit contre-attaquer dans GENNES.
La contre-attaque, menée par le lieutenant de GALIBERT, permet de réoccuper les emplacements de combat de la matinée sur la rive sud de la Loire.
19 H- : Les brigades sont débordées de tous côtés et l’ordre de repli est donné à l’Escadron FOLTZ.
21 H- : Décrochage sous un feu violent de l’escadron FOLTZ grâce à l’appui des auto-mitrailleuses. L’escadron stationnera à minuit à la LANDES ELEVEE.
Les opérations dans le sous-secteur de GENNES sont terminées. Le sacrifice du Lieutenant DESPIATS défendant l’Ile, sans esprit de recul, l’initiative, la clairvoyance et le sang-froid du Capitaine FOLTZ défendant GENNES jusqu’au bout, la belle attitude des lieutenants ROIMARMIER et BONNIN tués en pleine action, le cran déployé par les élèves de l’Ecole qui se sont brillamment comportés alors qu’ils voyaient le feu pour la 1ère fois, ont permis d’opposer une résistance acharnée, à un ennemi supérieur en nombre, muni d’artillerie, de blindés et de moyens de feu puissants.
B - ACTION SUR SAUMUR
NUIT DU 19 AU 2O JUIN :
Les tirs d’artillerie ennemie, de 77, de 105 et de "mienen", reprennent très violents sur l’Ile de Saumur, et sur la rive Sud de la Loire.
Ces tirs durent jusqu’à 5 H 10, Heure à laquelle des bateaux ennemis de 12 à 16 hommes sont mis à l’eau très rapidement et traversent la Loire. La base de feu de l’ennemi, composée de chars camouflés sur toute la rive Nord, ouvre le feu sans arrêt avec ses armes et canons automatiques. Les deux premiers bateaux réussissent à passer malgré le feu de nos mitrailleuses, mais les 4 bateaux suivants sont complètement vidés de leurs occupants et s’échouent. Deux autres bateaux remontent la Loire et abordent à l’Est.
Le groupe de l’Aspirant CECCALDI après une résistance acharnée où il laisse 3 tués et 7 blessés, tombe aux mains de l’ennemi.
Du P.C. on aperçoit plusieurs fusées blanches sur la crête du PETIT PUY, donnant la confirmation que l’ennemi a pris pied sur la crête.
Des dispositions sont prises pour prendre à partie les éléments ennemis ayant traversé la Loire, colmater la poche ouverte .par l’ennemi, et prendre liaison à AUNIS, avec l’Escadron St BLANQUAT, qui a l’ordre de tenir la ferme d’AUNIS.
8 H 30 - : La situation est la suivante :
L’attaque sur SAUMUR est plus puissante que celle sur GENNES. Elle est menée par la 1ère Division Blindée de Cavalerie allemande. Les tirs d’artillerie et d’armes automatiques continuent sur la Brigade de la LANCE, qui est prise à revers par l’ennemi. qui s’était infiltré par le haut de la falaise.
La Brigade NOIRTIN est complètement submergée et doit être considérée comme perdue pour le combat.
Le peloton moto IMBERT se heurte à l’ennemi au carrefour de VARRAINS, et son cher de peloton est tué.
Le Capitaine BLEUZE commandant le Bataillon de St MAIXENT a ordre de contre-attaquer en s’appuyant sur 1’Escadron St BLANQUAT qui. tient la ferme d’AUNIS.
Le Lieutenant PITIOT commandant le peloton de chars Hotchkis, se met à la disposition du Capitaine BLEUZE pour participer à la contre-attaque.
Midi : Le reste de la Brigade de la LANGE et les tirailleurs, sous le commandement du Lieutenant St GERMAIN, parviennent à traverser les lignes ennemies, et se replient sur Saumur par le Château.
Les autres Brigades barricadent toutes les rues venant du Château ou de DAMPIERRE, et se préparent à la Défense même de SAUMUR.
Le lieutenant de BUFFEVENT, au cours d’une reconnaissance au nord de la Loire a été tué, le reste de sa brigade réussit à traverser la Loire à la nage.
L’escadron de St BLANQUAT, menacé d’encerclement, est dans une situation critique. Le Capitaine BLEUZE, décide de pousser en avant les chars du lieutenant PITI0T pour dégager l’Escadron St BLANQUAT ; et ensuite soutenir la contre-attaque en neutralisant l’ennemi, sur la crête au Sud et à l’Est de la ferme d’AUNIS.
Les Allemands se sont aperçus de la préparation de l’attaque et déclenchent un tir de concentration et d’interdiction sur CHAINTRE et la sortie Nord de CHAINTRE.
Départ des chars français qui empruntent le chemin de terre de CHAINTRE, et se déploient devant la ferme d’AUNIS, bloquant les feux ennemis et dégageant l’Escadron St BLANQUAT. Le Lieutenant PITIOT est tué dans son char, car l’ennemi avait déjà mis en place de nombreuses armes anti-chars.
12 H 15 : Progression du Bataillon St MAIXENT, malgré les tirs très violents d’artillenie et d’armes automatiques ennemies.
Le contact est pris environ 500 mètres avant la ferme d’AUNIS La progression continue sous le feu maintenant des armes automatiques en position sur le piton d’AUNIS, et l’attaque française arrive à hauteur de l’Escadron St BLANQUAT qui est ainsi dégagé. Le colmatage de la poche est ainsi réalisé depuis la côte 20 jusqu’à SAUMUR, mais de nombreux attaquants auront été fauchés par le feu ennemi.
13 H 30 : Violente réaction de l’ennemi, qui un moment surpris, déclenche des tirs d’artillerie sur toutes les lignes et particulièrement sur la ferme d’AUNIS qui commence à prendre feu. Les chars encore. valides (5 étant hors de combat) s’étant heurtés à des canons anti-chars automatiques ne peuvent continuer leur action, et se replient vers DISTRE, où ils serviront d’appui au Commandant LAUNAY.
La ligne de feu sera tenue jusqu’au soir, à l’heure où dans tout le secteur, l’ordre de repli sera donné.
C - ACTION SUR MONTSOREAU
L’action a été moins importante que dans les autres sous-secteurs.
19 JUIN-2H : Le lieutenant TRASTOUR fait sauter le Pont à l’arrivée de motocyclistes allemands et de voitures 6 roues. Le poste de l’I1e ouvre le feu sur les éléments ennemis qui ripostent aussitôt.
Au cours de la journée, des éléments ennemis en civil, non identifiés se dévoilent à l’Ouest de l’Ile tenue par les tirailleurs, les prenant à revers sous les feux de mitraillettes.
20 JUIN : De minuit à 4 heures, tirs d’artillerie sur l’Ile et la falaise. Des civils non identifiés, en place certainement avant notre arrivée, sortent d’une maison et tentent de s’infiltrer en direction du poste de commandement, ouvrant le feu à la mitraillette et à la grenade.
Le Lieutenant commandant le poste fait une sortie à la grenade, et place un fusil mitrailleur de chaque côté du poste, afin de tenir le chemin situé à mi-hauteur de la falaise. Très curieusement, après échec de cette tentative, les tirs d’artillerie ennemie reprennent avec plus de violence. Des rapports ultérieurs, ont prouvé la présence dans cette région, d’un réseau important d’espionnage.
A 22 Heures, 1’ordre de décrochage étant parvenu, toute la Brigade et les Tirailleurs se mettent en route à pied, dans le plus grand silence, et ils gagnent la forêt de FONTEVRAUD sans avoir été repérés.
CONCLUSION
Les faits relatés ci-dessus (extraits du rapport officiel d’Etat-Major) sans appréciation ni commentaires, font ressortir lhéroïsme dépensé par les Combattants de l’Ecole de Cavalerie.
En leur demandant à participer à la défense de la Loire, le Colonel Commandant l’Ecole, savait la haute valeur morale des élèves qu’il engageait au Combat; Il ne pouvait espérer qu’elle se manifesterait avec un tel éclat.
Les élèves de l’école avaient mission de tenir : Ils ont tenu magnifiquement, acceptant le sacrifice sur les positions mêmes qu’ils avaient à défendre, contre-attaquant avec une farouche énergie, chaque fois que l’ennemi était parvenu à s’infiltrer dans leurs lignes.
Au soir du jeudi 20 JUIN, le secteur de SAUMUR était intégralement maintenu ; mais toutes les réserves du secteur étaient engagées, et en partie dépensées, et les pertes très sévères.
Une plus longue résistance n’était possible que si de nouvelles réserves avaient pu être mises à sa disposition, ainsi qu’un appoint d’artillerie dont le défaut s’est fait cruellement sentir durant tous les combats.
Faute de moyens et de munitions, pour poursuivre une défense efficace, le Commandant d’Etat-Major a dû se résoudre à entamer une manoeuvre en retraite sur la VIENNE, qui lui était demandée par le Général PICHON, Commandant la Région. Manoeuvre entamée le 20 Juin à 21 H 30 et disloquée dès le 21 au matin, par suite de la percée ennemie sur PORT BOULET et dans le secteur avoisinant.
Si un nombre important d’élèves privés de munitions et de tous moyens de transports ont dû sur l’ordre du Commandant de l’école, se résigner à cesser le combat dans la forêt de F0NTEVRAUDT, et accepter la dure épreuve de la captivité, ceux qui. disposaient encore de quelques munitions ont tenu à franchir les lignes ennemies en direction du Sud, et ont tenté de se raccrocher à quelques îlots de résistance.
Parmi ceux-ci, l’Escadron de l’héroïque Capitaine FOLTZ, s’est brillamment distingué, tenant tête à 1’ennemi, avec les débris de son unité : le 21 à ARGENTON, le 22 à BRESSUIRE, et le 23 dans la forêt de SECONDIGNY, ou n’ayant plus de munitions, celui-ci a fait enterrer les armes, et a conseillé à ses combattants de tenter leur chance en échappant à l’étreinte de l’adversaire.
C’est à ce stade de la bataille, qu’il est permis de constater que si les ressources en munitions et en matériel étaient réduites à néant, les ressources en énergie et en volonté n’étaient pas entamées malgré plusieurs nuits sans sommeil.
Entrant dans les vues de la Direction de la Cavalerie qui avait fait connaître son intention de regrouper l’Ecole dans la région de Montauban, trente Officiers ou Elèves, forçant les lignes de l’ennemi ou s’échappant de ses mains après capture, vont regagner leur unité.
L Ecole de Cavalerie a revendiqué l’honneur de participer à la défense de la Loire, dans le Secteur de SAUMUR, pour y affirmer, par des actes, la valeur de l’enseignement militaire et moral, que depuis son origine, elle n’a cessé de dispenser aux Cadres de la Cavalerie.
Elle a combattu,1es 19, 20 et 21 Juin 1940, jusqu’à l’extrême limite de, ses moyens, infligeant à l’ennemi les pertes les plus sévères, en en éprouvant elle-même de très lourdes, prodiguant des actes d’héroïsme, et inscrivant dans les fastes de la Cavalerie, une page digne entre toutes de son glorieux passé.