MADAGASCAR 29-30 Mars 1947: Le mystère reste entier
Que s'est-il vraiment passé dans la nuit du 29 au 30 Mars 1947 ? La question reste posée. Combien de victimes ? 10.000 ? 70.000 ? Ou 100.000 ? On l'ignore puisque les chiffres n'ont jamais été officiels et que, pour comble, aucune enquête n'a été diligentée, sauf celle qui concernait les victimes françaises. En 1947, la Grande Ile compte 4 millions d'habitants, dont 35.000 Européens. Selon certains historiens, l'insurrection n'a pas surpris l'administration française, elle s'y était même préparée. D'autres parlent d'une manipulation savamment orchestrée pour mettre hors d'état de nuire les leaders indépendantistes malgaches, Ravoahangy, Raseta et Rabemananjara. Un an plus tôt, ceux-ci avait déposé un projet de loi devant l'Assemblée Nationale, soulignant que « Madagascar est un état libre qui a son propre gouvernement, son parlement, son armée, ses finances, au sein de l'Union française ». Le projet de loi a été repoussé et, un an plus tard, ce fut l'insurrection. Des groupes armés malgaches ont attaqué des casernes, se sont emparés des arsenaux et tué des ressortissants européens. La répression qui s'ensuivit a fait officiellement 89.000 morts côté malgache ; les forces coloniales, elles, ont perdu 1900 hommes (des supplétifs malgaches). D'autres européens morts sont aussi recensés : 550 européens, dont 350 militaires. La justice française a mis la responsabilité de la rébellion sur le dos des trois députés malgaches : deux sont condamnés à mort, mais leur peine a été commuée en exil. Les témoignages des nationalistes de l'époque faisaient état de tortures et d'autres sévices indignes d'une république française qui venait de sortir victorieuse d'une guerre où elle avait été également victime de l'horreur nazie. La répression a été terrible et hors de proportions car, en fin de compte et selon toujours des chiffres officiels, le corps expéditionnaire comptait tout d'abord 18.000, puis 30.000 hommes plus tard. Ce sont les mêmes chiffres qui disent que les insurgés n'avaient que… 250 fusils. La plupart était armée de sagaies. Les « rebelles » n'avaient pas non plus la caution populaire puisque très peu de malgaches croyait à l'efficacité de l'insurrection. A Antananarivo d'où devait partir l'ordre des attaques, les « instigateurs » ont décidé de tout arrêter au dernier moment, conscients qu'ils étaient de l'inégalité des forces. La question qui se pose actuellement est de savoir pourquoi la France a décidé de réagir avec une telle énergie : pour donner l'exemple ? Effectivement, des rumeurs de révolte étaient palpables un peu partout dans les colonies, mais seule la Grande Ile avait osé franchir le pas. Ce n'est que plus tard que l'Indochine allait prendre les armes et l'Afrique du Nord secouer le joug. A Madagascar plus tard, la commémoration du 29 Mars était célébrée dans la douleur certes, mais la date se faisait oublier petit à petit. Dans un élan nationaliste, l'Amiral avait essayé de tirer profit de l'événement pour son propre compte, mais cela n'a pas servi à ranimer l'esprit patriotique malgache, et les vrais soldats de 1947 décédèrent l'un après l'autre dans la déchéance totale. Des esprits téméraires ont même essayé de faire payer à la France le prix des dommages malgaches, mais en vain. Jusqu'à présent, 1947 reste une épisode dramatique de l'histoire malgache. Pour cette année, la commémoration de cette date se réduit à trois lignes dans le rapport du conseil de gouvernement. Peut-être essaye-t-on de gommer cette date de la mémoire collective … Ce qui est dommage.
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