Le show Taubira à l'assemblée
et la menace qu'elle fait peser sur le gouvernement de Manuel Valls. Quoiqu'il arrive d'ici 2017, Christiane Taubira -jadis indépendantiste, avant-hier alliée de Bernard Tapie, aujourd'hui indépendante tout court- aura été la ministre la plus inattendue et la plus marquante du quinquennat Hollande. Ministre la plus inattendue parce que personne n'imaginait le poids politique qui allait être le sien lorsque le nouveau président de la République
l'a nommée Garde des Sceaux le 16 mai 2012. Ce n'était pas d'ailleurs pas elle qui était en tête à l'époque de la liste des pressentis pour ce poste emblématique.
Ministre la plus marquante parce que, depuis sa gestion du dossier du mariage pour tous, elle se singularise - c'est un fait - par un talent oratoire, une aptitude à l'improvisation comme à la polémique, et un goût pour les références littéraires, voire poétiques qui font vibrer la gauche. Et qui la font vibrer d'autant plus qu'il n'y a plus au Parlement de grands orateurs avec ce que cela implique de lyrisme et de changements de rythme.
Ovationnée avant qu'elle ait parlé 
Du coup, si Christiane Taubira se voit reprocher, même à gauche, d'agir peu et de réformer moins encore, la Ministre de la Justice dispose aujourd'hui d'un statut à part, comme on a encore pu le constater ce mardi 23 juin à l'Assemblée lors de la séance des "questions d'actualité".
Téméraire, le député républicain Eric Ciotti interpelle la Garde des Sceaux et lui fait la leçon, lui demandant de s'expliquer sur des déclarations, effectivement ambivalentes, où elle parait menacer le Premier ministre de claquer la porte si on laisse enfermé dans un tiroir son projet controversé de réforme de la justice des mineurs.
C'est alors que Christiane Taubira se dirige vers les micros. Pour répondre à Ciotti. On assiste alors à un spectacle étonnant : tous les députés de gauche présents se lèvent, et l'ovationnent avant même qu'elle ait parlé.
Sont-ils tous d'accord avec ses idées sur la justice de mineurs? Pas sûr. Mais l'important n'est pas là.
La tension Taubira-Valls L'important, c'est que Christiane Taubira - qu'on avait vu en août 2014 venir s'asseoir à La Rochelle à la surprise générale au milieu des députés frondeurs qui n'en croyaient pas leurs yeux - incarne -qui l'aurait cru quand son maintien en 2002 a contribué à l'échec de Lionel Jospin? - la gauche qui ne veut pas être réduite à des chiffres, à des soustractions, à la gestion, bref la gauche nostalgique des jolis temps d'antan.
En l'ovationnant mardi, les députés socialistes ont rendu hommage à son talent, rendu hommage à celle qui aura à sa façon porté, avec le mariage pour tous, la seule réforme symbolique du quinquennat, rendu hommage aussi à une frondeuse nostalgique de l'époque où il était plus facile d'être "de gauche" puisqu'il y avait quelque chose à distribuer.
En tout cas, Manuel Valls -dont les relations avec Christiane Taubira sont compliquées et parfois explosives - l'aura compris : une femme comme elle (aussi insolente soit-elle et qui sait, comme on dit, jusqu'où aller trop loin), on la traite à part, on la ménage, on ne la provoque pas.
Ou bien on prend des risques.
De gros risques. Car le message de Christiane Taubira est clair : si elle devait demain "tomber", ce serait du côté gauche.
La politique en coulisses : l'insolente... par lejdd 
Jeu 25 Juin - 19:11
